2 questions À Marc Daguzon, directeur des études du master Métiers de l’enseignement et de l’éducation IUFM d’Auvergne

Comment la formation peut-elle influencer la pratique ?
- On a eu longtemps tendance à penser que ce que l’on a découvert dans la recherche, on va pouvoir l’appliquer dans la formation. Or en se centrant sur un objet précis, la recherche évacue des éléments de contexte et ne fait apparaître qu’une partie du tout. Celui qui fait la classe sait bien qu’il y a d’autres éléments qui vont venir perturber les prescriptions. La formation, donne un éclairage sur un point précis mais ce sont les formés qui devront s’en emparer pour le traduire, le remettre en situation par un rééquilibrage de ce qu’ils ont l’habitude de faire : c’est ce que j’appelle la redéfinition de la tâche. Ce qui a été éclairé va être accentué, les priorités vont être modifiées mais les enseignants ne vont jamais faire exactement ce qu’on leur dit de faire. La recherche est la partie émergée de l’iceberg qu’est la pratique, elle ne fait que mettre des mots sur des choses qui existent. Elle n’invente pas de nouvelles pratiques, elle les met en lumière, elle les explicite, elle met en évidence certaines de leurs contradictions. Cette explicitation rend la pratique du métier plus cohérente, plus rationnelle mais ce faisant elle s’éloigne de la réalité du terrain dont la complexité est difficile à traduire en problème de recherche.
Quel rôle jouent les formateurs de terrain dans ce processus ?
- La spécificité du formateur qui a eu ou a encore charge de classe est qu’il a à la fois pris de la distance et rationalisé un certain nombre de pratiques et dans le même temps, il est en empathie et à l’écoute des résistances que peut exprimer le formé. Ça ne veut pas dire qu’il est un spécialiste de tout mais le fait qu’il ait lui-même vécu cette expérience de distanciation le place dans l’interface entre recherche et terrain. De plus, le propre du formateur du premier degré, c’est que, du fait de la polyvalence, il est capable de transférer ce qu’il a acquis d’un domaine sur un autre, et qu’il est capable de traduire ces transferts en termes de gestes professionnels et de postures.
L’ensemble du dossier
"Recherche et métier : des ponts à construire "
Université d’automne du SNUipp -FSU
Programmes : sortir de l’université
Formateurs : le chainon manquant
Orthographe : l’indispensable médiation
Pratiques pédagogiques : à la recherche du consensus
En bref
« Un rôle décisif dans l’infléchissement des pratiques »