Interpellation des candidat·es : les réponses
Mis à jour le 06.04.22
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Le SNUipp-FSU a interpellé les candidat·es à l’élection présidentielle sur des mesures fortes soutenues très largement par les enseignant·es et les AESH dans les deux consultations qu’il vient de mener en partenariat avec Harris interactive. En plus d’établir un bilan tranchant de l’état de l’école et de leur métier, les 24 867 enseignant·es et les 2 213 AESH consulté·es ont ainsi plébiscité cinq éléments essentiels pour l’avenir de l’école : la baisse des effectifs dans toutes les classes, la hausse des salaires, l’abrogation de la loi de transformation de la fonction publique, l’amélioration de l’inclusion scolaire et le maintien de l’organisation actuelle de l’école avec une directrice d’école pair parmi ses pairs.
Au final, 7 candidat·es ont répondu à cette interpellation, les 3 candidat·es d’extrême-droite n’ont pas été sollicité·es et le candidat-président nous a fait savoir que «dans le délai imparti, il n’était pas possible de répondre à votre interpellation ».
Passage en revue synthétique des réponses des candidat·es.
Baisser les effectifs dans toutes les classes
« La baisse des effectifs au sein de toutes les classes est plébiscitée comme efficace à 99% pour améliorer les apprentissages des élèves et l’inclusion au sein de l’école. »
Quel plan de recrutement et de construction de bâti scolaire allez-vous mettre en place au cours du prochain quinquennat pour permettre cette baisse ?
Plusieurs candidat·es s’engagent à recruter des enseignant·es pour baisser les effectifs des classes.
Ainsi Jean-Luc Mélenchon estime les besoins à 160 000 enseignant·es dont 60 000 dans le primaire sur le quinquennat à venir en priorisant la maternelle et l’éducation prioritaire pour porter la taille des classes à 18 maximum en maternelle et 19 en élémentaire. Fabien Roussel prévoit lui 90 000 recrutements et une limitation des effectifs à 20 tout en actant « un grand plan national de construction, de rénovation et d'équipement des locaux scolaires ». Yannick Jadot entend lui aussi adapter les bâtiments scolaires en permettant également leur rénovation thermique, fixe un maximum de 25 élèves par classe passant par un recrutement de 65 000 enseignant·es. Philippe Poutou fixe lui une limite à 20 par classe et 12 en éducation prioritaire sans chiffrer précisément le recrutement nécessaire. Nathalie Arthaud promeut elle un recensement démocratique des besoins par les personnels avec l’aide des parents pour bâtir un « plan massif de recrutement et de construction du bâti scolaire ». Valérie Pécresse propose un « dédoublement de classes sous la forme innovante de deux enseignants présents dans la classe, là où les besoins l’exigent » et un plan de recrutement de 10 000 personnels dont des surveillants. De son côté Anne Hidalgo n’a pas répondu à la question et propose diverses mesures pour l’école sans aborder la question de la taille des classes et du recrutement d’enseignant·es.
Augmenter les salaires
« La hausse des salaires est la mesure prioritaire pour améliorer la situation professionnelle des personnels, en plus de la titularisation comme fonctionnaire pour les AESH. »
Quels moyens budgétaires allez-vous y consacrer et sur quelles perspectives de revalorisation des grilles salariales vous engagez-vous ?
Nombre de candidat·es posent la nécessité d’une augmentation des salaires. Ainsi Yannick Jadot envisage une revalorisation de 5% pour l’ensemble des fonctionnaires et un alignement du salaire des enseignants sur l’OCDE, estimé à une hausse de 20% en moyenne. Anne Hidalgo a ce même objectif et veut porter leur salaire « progressivement au niveau de celui des cadres, en commençant par les débuts de carrière ». Fabien Roussel propose lui une augmentation immédiate de 30% et un salaire minimum de 2200€ pour les enseignant·es. Jean-Luc Mélenchon, lui, s’engage pour une augmentation de 30% en moyenne avec une hausse immédiate de 10% du point d’indice suivie d’une refonte des grilles indiciaires, des mesures chiffrées à 11 milliards par an. Philippe Poutou exige pour sa part une augmentation des salaires et des pensions des personnels de l’éducation à hauteur de 33%. Nathalie Arthaud revendique, elle, un salaire minimum de 2000 € net et des augmentations de l’ordre de plusieurs centaines d'euros au minimum.
Valérie Pécresse prévoit une augmentation des salaires pour les seuls enseignants en début de carrière et pour « ceux qui acceptent des missions supplémentaires ou enseignent dans des territoires ruraux isolés ou des établissements particulièrement difficiles ».
Maintenir un fonctionnement et une direction de l’école non hiérarchique
« Le fonctionnement de l’école primaire est promis à un fort bouleversement, débuté avec la loi dite de « l’école de de la confiance » et poursuivi avec la loi Rilhac. Pourtant les enseignant·es rejettent la mise en place d’un directeur·trice d’école comme « supérieur·e hiérarchique » à 85% et plébiscitent au contraire l’organisation actuelle de l’école avec le conseil des maître·sses animé par leur collègue directeur·trice « pair parmi ses pairs ».
Quelles organisation et fonctionnement de l’école promouvez-vous ?
Valérie Pécresse n’envisage pas de « revenir sur les lois » évoquées et affirme qu’elle n’a pas pour projet « d’instituer des écoles primaires sous la forme d’EPLE ». Jean-Luc Mélenchon est « favorable à une organisation qui repose sur la confiance en l’expertise des enseignant·es », propose d’abroger le loi Rihlac, d’augmenter la décharge de direction et de mettre fin aux dispositifs d’évaluation et de contrôle mis en place ces cinq dernières années. Fabien Roussel n’est pas favorable non plus à « une direction d'école sous forme hiérarchique », promeut également une hausse de décharge comme une « aide suffisante » pour les directrices·teurs. De même, Yannick Jadot est « opposé à une gouvernance de l’école verticale », entend favoriser une plus grande autonomie pédagogique des équipes et en finir avec les « évaluations permanentes et la mise sous pression ». Philippe Poutou pose également la nécessité d’abroger la loi Rihlac et promeut « un fonctionnement organisé entre pairs, sans rapport hiérarchique », proposant la tenue de « conseils réguliers » englobant chaque personne travaillant dans l’école. Nathalie Arthaud dénonce la « caporalisation de plus en plus grande des enseignants » et promeut également un fonctionnement collectif.
De son côté Anne Hidalgo n’a pas répondu à la question et propose diverses mesures générales pour l’école, notamment sur la mixité sociale, sans aborder la question de la direction et du fonctionnement de l’école.
Améliorer l’inclusion scolaire
« L’inclusion est jugée comme mal prise en compte par l’institution scolaire (96% des enseignant·es, 73% des AESH et 53% des français·es). Plusieurs mesures sont plébiscitées par les personnels pour y remédier : allègement des effectifs mais aussi maintien des structures d’accueil spécialisées, recrutement d’enseignant·es spécialisé·es, véritable statut pour les personnels AESH, formation, matériel pédagogique adapté… »
Comment allez-vous améliorer l’inclusion scolaire pour que l’école publique puisse permettre à tous les élèves, dans un cadre collectif, d’avoir les outils d’accès aux savoirs et à la culture commune ?
Les candidat·es entendent tous·tes améliorer considérablement l’inclusion scolaire et envisagent pour cela d’actionner différents leviers. Ils placent l’amélioration de la situation des AESH comme prioritaire. Ainsi Jean-Luc Mélenchon entend créer « un véritable service public d'accompagnement des élèves en situation de handicap, avec un nouveau corps de fonctionnaire et un service de 24 heures pour un temps plein » en formant et en y titularisant les actuels AESH et en supprimant les PIAL. Fabien Roussel, Yannick Jadot, Philippe Poutou et Nathalie Arthaud défendent également un statut de la Fonction publique pour les AESH.
Le recrutement d’enseignant·es spécialisé·es « en nombre » comme le promeut Nathalie Arthaud est également avancé par l’ensemble des candidat·es de gauche. Fabien Roussel et Anne Hidalgo entendent reconstruire les RASED et Yannick Jadot instaurer « des binômes enseignant·e/enseignant·e spécialisé·e » comme en Italie tout en développant la formation. Jean-Luc Mélenchon souhaite augmenter le nombre des enseignant·es référent·es « afin de garantir un suivi individualisé de qualité » et propose aussi une limitation à dix élèves par classe en unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) et la création de structures nécessaires.
De son côté Valérie Pécresse souhaite « déprécariser les AESH et assurer la continuité entre la vie familiale et la vie scolaire » et la mise en place de « parcours scolaires fluides et adaptés aux besoins de chaque élève ».
Rétablir des règles équitables et transparents pour la gestion des carrières
« La loi de « transformation de la Fonction publique » a profondément modifié la façon dont les personnels sont affectés ou promus en en rendant opaques et illisibles les modalités. Pourtant les enseignant·es démontrent à 96% leur attachement à des règles équitables et transparentes de gestion des personnels (mouvement, promotion…) étudiées en commission paritaire avec leurs représentant·es élu·es. »
Allez-vous abroger cette loi de « transformation de la Fonction publique » et revenir à une gestion équitable et transparente des carrières des personnels ?
L’ensemble des candidat·es de gauche s’engagent pour abroger la loi de transformation de la Fonction publique. Comme Fabien Roussel pour qui ce texte « vise l’extinction progressive du statut de la fonction publique » et est « l’un des plus réactionnaires de l’histoire de notre République ». Yannick Jadot entend « redéfinir en négociation avec les partenaires sociaux des outils adaptés au dialogue social, notamment sur les enjeux de santé au travail et de gestion de carrière ». Pour Anne Hidalgo « l’équité et la transparence dans la gestion des personnels doivent être remises à l’ordre du jour pour mettre fin aux modalités actuelles ». Jean-Luc Mélenchon entend rétablir également les commissions paritaires pour « une gestion transparente et équitable des carrières et des mutations » et également mettre fin à « tous les dispositifs locaux de recrutement et de gestion des carrières ». Philippe Poutou quant à lui estime que « la gestion déshumanisé, comptable et injonctive des enseignant·es a entraîné de nombreuses souffrances et des drames » tandis que pour Nathalie Arthaud cette loi « pousse en plus dans un sens managérial, avec l'objectif affiché de gérer les personnels comme dans une entreprise ».
De son côté Valérie Pécresse n’entend pas « revenir sur cette loi, qui devra toutefois être évaluée car ses effets vont bien au-delà de la seule fonction publique enseignante ».
Le verbatim intégral de leurs réponses est à lire ici :