Vaccination : ailleurs, c'est comment ?
Mis à jour le 30.03.21
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Alors que le gouvernement ne change pas de cap sur la vaccination des enseignantes et enseignants, regarder les choix fait ailleurs montre bien l'inanité de la gestion pandémique dans notre pays. Et la légitimité des revendications de la FSU
Alors que l'épidémie flambe partout dans le monde, différentes stratégies se sont mises en place. Un état des lieux a pu être effectué lors d'un webinaire organisé par l'internationale de l'éducation (IE) le 11 mars dernier.
Le bilan est sans appel : la vaccination des personnels des écoles est majoritairement engagée.
Une raison de plus que d'exiger, dès maintenant, la vaccination, ici, chez nous : https://la-petition.fr/campagne-de-vaccination-urgence
Tour d'horizon issu du Webinaire du 11 mars dernier
Pays où les enseignant-es sont prioritaires
Dans un nombre important de pays, et toujours sous la pression des syndicats, les gouvernements ont accepté de donner une priorité aux enseignant-es, voire à tous les personnels de l’éducation, dans la campagne de vaccination. Mais la situation sur le terrain est très variable en fonction de l’importance de la campagne de vaccination et du nombre de doses accessibles.
En Espagne et en Italie, le gouvernement a donné une priorité aux enseignant-es, ainsi qu’au Portugal. Mais les doses manquent encore dans ces trois pays, si bien que tous les enseignant-es sont loin d’être vacciné-es. En Espagne les syndicats regrettent que le personnel des universités n’ait pas été associé à cette priorisation. En Italie la campagne de vaccination est régionale et se heurte aux dysfonctionnements locaux dans certains cas ou à l’absence de doses : ainsi la proportion de personnels enseignant-es vaccinés va aujourd’hui de 70 % à…3 % selon les provinces. Au Portugal la vaccination des personnels de l’éducation est commencée.
En Amérique latine, deux pays ont pu faire jouer la force de leurs syndicats pour contraindre les gouvernements à accorder une priorité aux enseignant-es : c’est le cas du Mexique et de l’Argentine. La vaccination a commencé dans l’État de Campeche (sud du Mexique) mais les doses manquent. En Argentine la vaccination avance et le gouvernement a accepté de renforcer le protocole depuis la réouverture des écoles avec la fermeture systématique des classes en cas de contamination d’un seul élève, avec dans ce cas retour à un enseignement distanciel pour une semaine.
Au Maroc aussi, la vaccination a bien démarré avec des doses d’AstraZeneca et de vaccin chinois et une priorité accordée aux enseignant-es depuis début février. A noter que les enseignant-es étranger-es sur le sol marocain en bénéficient aussi, comme ces enseignant-es français-es des lycées de l’AEFE.
A côté de ces pays où la vaccination a bien commencé et, même s’il manque des doses, offre des perspectives de sortie de crise aux enseignant-es , il existe aussi des pays où la priorité tient de la promesse encore non tenue, faute de vaccins. C’est le cas de l’Albanie qui manque cruellement de vaccins mais qui devrait placer les enseignant-es dans le groupe prioritaire. C’est aussi le cas du Mozambique où le gouvernement a placé le personnel de santé dans le groupe 1, et promis que les enseignant-es feraient partie des priorités suivantes…mais sans plan clair de vaccination ni doses.
Enfin, en Côte d’Ivoire, si le nombre de doses est encore minime, les enseignant-es sont prioritaires, mais ne sont guère enthousiastes à se faire vacciner dans un pays où le nombre de morts est faible. « Le personnel enseignant perçoit la vaccination comme un laboratoire à ciel ouvert et émet des réserves et des doutes sur la qualité des vaccins, il y a un travail d’information et de sensibilisation à faire en direction du personnel enseignant » déclare un syndicaliste du SYNAFETPCI. « Une campagne de vaccination dans un pays jeune où le nombre de décès par semaine est en-dessous de la dizaine suscite interrogation sur sa pertinence », ajoute-t-il. « il faudra sensibiliser le personnel enseignant pour obtenir son adhésion et ainsi arrêter la contamination » mais « les autorités ne communiquent pas sur la contamination dans les écoles », ce qui la rend invisible.
Pays sans priorité accordée aux enseignant-es :
Certains pays n’ont pour le moment accordé aucune priorité aux enseignant-es dans la campagne de vaccination. Dans la plupart de ces pays, à l’exception des Pays-Bas, cela suscite la plus vive inquiétude des syndicats enseignants et la revendication d’une rapide priorisation.
Aux Pays-Bas, aucune priorité n’est accordée au monde enseignant, à l’exception des éducateurs spécialisés qui travaillent avec des enfants en situation de handicap. « La difficulté pour nous est de trouver des arguments », avoue Trudy Karperien de l’AOB, « car les statistiques montrent que les enseignants ne sont pas plus affectés par le virus que les autres professions. Le fait qu’un enseignant contaminé pourrait diffuser le virus dans un groupe plus large n’est pas non plus un argument car la priorité est donnée à l’accessibilité au système de santé, or les personnes jeunes ou d’âge moyen font rarement des formes graves de la covid ».
En Belgique, les priorités ne sont pas fondées sur la pratique professionnelle mais aussi sur le danger de développer une forme grave. Par conséquent une priorité est accordée aux personnes âgées, aux personnes vulnérables, aux personnes handicapées et aux personnels médicaux. Seul-es les enseignant-es présentant des comorbidités ont pour le moment une priorité vaccinale.
Au Québec, le personnel enseignant ne fait pas partie non plus des groupes prioritaires pour la vaccination.
Au Liban, ce n’est pas le gouvernement mais la Croix-rouge internationale qui vaccine et qui a déterminé des priorités par âge uniquement. Les enseignant-es ne sont pas prioritaires mais les écoles restent fermés.
Enfin, deux pays connaissent déjà un grand nombre d’ enseignant-es vacciné-es mais non parce qu’une priorité leur a été accordée : il s’agit de pays où la vaccination s’est déployée avec une particulière ampleur et qui ont disposé d’un nombre important de doses. Le Royaume Uni n’a jamais accordé une priorité aux enseignant-es ou aux autres personnels de l’éducation mais a procédé par tranches d’âge de 10 ans, si bien qu’aujourd’hui les 60-69 ans et les 50-59 ans sont majoritairement vaccinés (avec une seule dose). En Australie, avec un nombre de doses commandées très élevées (trois fois supérieures à la population), la vaccination avance vite, mais les enseignant-es ne sont pas particulièrement prioritaires.