A Marseille, un état d'usure avancé
Mis à jour le 18.06.21
min de lecture
Reportage à l’école élémentaire National de Marseille : le délabrement s’éternise.
À l’école élémentaire National de Marseille (13), les enseignant•es font face à un délabrement qui s’éternise.
L’école élémentaire National dans le troisième arrondissement de Marseille (Bouches-du-Rhône), quartier populaire, témoigne emblématiquement de l’insalubrité des écoles de la ville. L’édifice correspond à d’anciens locaux de la Poste, il n’a donc pas été pensé en fonction de possibles pédagogiques, ni même plus globalement pour accueillir les quelques 390 élèves. Ce qui manque le plus, c’est l’espace. L’exiguïté se ressent avant même d’entrer dans l’école, avec un trottoir trop étroit pour accueillir le flux des familles. L’équipe éducative a aménagé deux lieux de sorties, puis trois depuis la Covid-19, histoire de répartir un peu l’affluence, mais cela reste serré. Ce manque d’espace se retrouve dans les classes avec des pièces étroites. Le dédoublement des CP et CE1 pour cette école de REP+ a complexifié le problème. Certain•es, ont mis des cloisons pour séparer la classe, ce qui donne 25 m2 pour 12 élèves ! Pas de quoi proposer des espaces lecture ou de réfléchir à des configurations en îlots. « Régulièrement, nous nous installons dans la BCD avec mon groupe d’élèves », explique Mickaël Brégliano, enseignant en CP. « Mais c’est fluctuant car elle sert aussi à toute l’école. »
La cour de récréation, enclavée entre les bâtiments, n’est pas plus large. L’équipe enseignante a pourtant travaillé à son aménagement avec les élèves qui avaient mis en place des zones d’activités. Mais cela ne crée pas d’espace pour courir. Si le protocole sanitaire a engendré des récréations décalées réduisant la densité, la première commence à 9h25 ce qui n’est pas très « raccord » avec les besoins de pause. C’est également une gêne pour les élèves encore en classe.
Chantier en attente
Au-delà de l’inadaptation du bâti, le manque d’entretien pendant des années des écoles marseillaises entraîne un état de délabrement qui ne permet pas un climat « sécure ». Il faut parfois jongler entre les gouttes d’eau : gouttières cassées, fuites dans le plafond, cour inondée. Et puis il y a le carrelage décollé, les dalles de plafond ou du préau qui tombent, les portes coincées, les larves de moustiques, les moisissures ou les effritements de murs… Là encore, les PE pallient comme ils peuvent en recollant les dalles, en achetant des étagères ou en installant des tringles et des rideaux pour rendre la classe plus agréable. « Pour que ça avance, on s’est habitué à faire nous -mêmes », précise Mickaël. Malgré la réalisation de travaux d’urgence, l’essoufflement se fait sentir et les perspectives s’enlisent. La vétusté et l’inadaptation des bâtiments nécessitent une rénovation d’ampleur, or elle ne cible pour l’instant que 10 écoles sur les 511 de la ville et le plan d’urgence reste suspendu à une subvention de l’État. En attendant, « on garde le sentiment que l’effort n’est pas fait pour ces familles, ces conditions s’ajoutent aux manques de moyens actuels dans l’éducation. Alors malgré l’usure, on continue à accueillir les enfants au mieux en tentant de faire que les inégalités se creusent moins vite. »