Coup de chaud sur les écoles

Mis à jour le 06.12.24

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Face au dérèglement climatique, le bâti scolaire nécessite une rénovation d’ampleur

Avec notamment la multiplication des épisodes caniculaires, le bâti scolaire, vieillissant et inadapté, nécessite une rénovation d’ampleur. Malgré le plan gouvernemental prévoyant de réhabiliter 40 000 écoles d’ici à 2034 et des initiatives locales encourageantes, la communauté éducative s’inquiète des conditions d'apprentissage et d’enseignement.

« Il s’agit d’isoler le plus possible les bâtiments scolaires, notamment en végétalisant l’école mais aussi ses environs, pour rendre les étés supportables et échapper à des températures empêchant les élèves de se concentrer, affirme le réalisateur et auteur Cyril Dion . Éco-construire des écoles et penser le tissu urbain autour suppose une volonté politique des collectivités locales et de l’Éducation nationale ».

« Rendre les étés supportables et échapper à des températures empêchant les élèves de se concentrer »

Chaque jour, en effet, plus de 13 millions de personnes fréquentent une école, un collège ou un lycée, soit un patrimoine public de 63 000 bâtiments et près de 157 millions de mètres carrés. Face aux effets récurrents du dérèglement climatique sur les territoires hexagonal et ultra-marin et à la nécessité de se conformer aux objectifs européens de baisse de la consommation énergétique, l’urgence d’un plan de rénovation des écoles s’est imposée à l’État et aux collectivités. Ce programme lancé à la rentrée 2023 prévoit la rénovation de 2 000 écoles primaires d’ici à la fin de l’année et de 40 000 à l’horizon 2034. Il pourrait toutefois faire les frais d’arbitrages budgétaires défavorables.

Alors qu’en 1990, la France connaissait en moyenne deux jours de vague de chaleur annuelle, les épisodes caniculaires sur le territoire concernent depuis 2020 huit journées par an. En outre, selon l’organisation Oxfam, au vu de la vétusté du bâti scolaire, 1,3 million d’enfants de maternelle notamment serait exposé d’ici à 2030 à des températures excédant les 35° dans les classes. Ainsi, 55% des écoles maternelles seraient concernées, avec de fortes disparités territoriales. Une situation d’autant plus critique que, comme le rappelle l’Unicef dans un rapport d’août dernier, les jeunes enfants sont davantage vulnérables à la chaleur du fait d’une plus faible thermorégulation corporelle et d’une moindre reconnaissance des signes d’alerte. Pour tenir compte de cette vulnérabilité, la Défenseure des droits préconise notamment l'accélération de la rénovation du bâti scolaire dans son rapport de novembre 2024.

« Stimuler l’imagination des pratiques enfantines, répartir l’occupation de l’espace et apaiser le climat scolaire »

IMPLIQUER LES ÉQUIPES

« La plupart des écoles, vieillissantes, n’ont pas été conçues en tenant compte du confort d’été, constate Angélique Liard, chargée de mission au Conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnement de la Drôme. Le contrôle des apports solaires et la gestion de la qualité de l’air sont souvent peu ou mal traités. En outre, les cours d’école souvent imperméables, réalisées en enrobé avec peu de végétation, ajoutent des îlots de chaleur ». « En tant que maîtrise d’usage, les enseignants font partie du projet de réhabilitation parce qu’ils connaissent le bâtiment. Ils peuvent solliciter les élus en cas de problème », ajoute Angélique Liard.

Les personnels de l’école maternelle de Montmidi, à Poitiers dans la Vienne, ont été associés à la conception d’un bâtiment scolaire bioclimatique construit par la ville, qui souhaite atteindre des « performances environnementales et énergétiques très élevées », en particulier en traitant l’isolation du bâtiment pour à la fois réduire la consommation d’énergie l’hiver et préserver le confort thermique l’été. Partie prenante de ce projet exemplaire, la directrice de l’école a bénéficié de huit jours de décharge pour intégrer les réunions de chantier. « Avoir pu participer à ce projet et travailler dans une école de cette qualité environnementale…, ça n’arrive jamais dans une carrière », se réjouit l’enseignante.

La ville de Lons-Le-Saunier (Jura) mène elle aussi une opération ambitieuse portant sur la végétalisation des cours dont celles des écoles maternelle et élémentaire Jacques Prévert. Un chantier visant à offrir un îlot de fraîcheur, stimuler l’imagination des pratiques enfantines, répartir l’occupation de l’espace et apaiser le climat scolaire.
Pour Fabienne Giroud, enseignante à l’école élémentaire, cela « crée un autre rapport à la nature et au vivant, cela modifie les représentations de ces enfants qui habitent au milieu du béton ».

Le lien entre un climat plus supportable et des relations sociales apaisées ne surprend pas Cyril Dion : « Dans sa structuration physique, son insertion territoriale, le partage avec les autres espèces vivantes, une autre façon d’enseigner, une école d’avenir doit proposer le récit d’une sobriété adaptée aux transformations climatiques et écologiques. Dans un monde où se parler, s’entendre, parvenir à une interprétation commune du réel devient de plus en plus difficile, il faut des bâtiments qui, dès l’enfance, permettent le brassage, la rencontre, le dialogue, la coopération ».

INVESTIR

Dans le cadre de la mission d’information « Le bâti scolaire à l’épreuve de la transition écologique », la FSU a été reçue par le Sénat en mars 2023. Pour le premier degré, elle constate que « les équipes sont trop souvent mises à l’écart des travaux. Leurs conditions de travail ne sont pas assez prises en compte pour la rénovation ou la construction du bâti scolaire. » Or, ces travaux doivent s’inscrire dans « l’absolue nécessité de la continuité d’un service public d’enseignement de qualité ».

Par ailleurs, la décentralisation renforçant la charge financière des écoles pour les collectivités entraîne des inégalités territoriales. Malgré l’annonce gouvernementale en 2020 d’une subvention de 4 milliards d’euros, seuls 3% des écoles ont obtenu des travaux allant du changement de quelques fenêtres à la réhabilitation complète. L’école a pourtant besoin « d’un grand plan national d’investissement et de rénovation du bâti scolaire ».

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