Formation : entrer par la bonne porte

Mis à jour le 21.05.21

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La réforme prévue pour la rentrée complexifie et alourdit encore la formation initiale

La réforme prévue pour la rentrée prochaine complexifie et alourdit encore la formation initiale des futurs PE, sans répondre aux véritables enjeux. La conception même du métier enseignant, une année de M2 particulièrement chargée, le manque de passerelles avec la recherche et la multiplication des tâches risquent de fragiliser le début de carrière et de rendre le métier encore moins attractif.

Enseigner est un métier qui s’apprend. Comme une petite comptine, cette phrase a toujours semblé guider le principe de la formation initiale même si certaines réformes passées ne l’ont pas toujours appliqué. Pour preuve, celle de 2008 où seul un DVD servait de support de formation ! Depuis l’époque de l’École normale, le niveau de recrutement des enseignants a progressivement été relevé pour se faire en fin de première année de master (MEEF ou autre). Après le concours, les futurs PE bénéficiaient d’une année partagée entre temps de classe et temps en Inspé avant d’entrer à temps plein dans la classe en tant que T1. La réforme engagée par le ministre de l’Éducation nationale à compter de la rentrée prochaine vient changer la donne. Ce n’est qu’à l’issue du Master 2 que les futurs PE effectueront leur année de stage. En réalité, c’est une véritable usine à gaz qui se profile avec 4 voies possibles pour parvenir au M2 et deux modalités différentes pour l’année de formation initiale : temps plein en classe pour les uns, mi-temps devant les élèves et mi-temps à l’Inspé pour les autres.

Nécessité d'un accompagnement plus fort

Le recul d’une année supplémentaire pour le passage du concours risque de peser sur la démocratisation de l’accès au métier et sur son attractivité déjà dépréciée. À cela s’ajoute que la réforme voulue par Jean-Michel Blanquer tend à transformer le métier de PE en le faisant passer d’un rôle de conception, nécessitant connaissances disciplinaires et compétences pédagogiques, à celui d’exécutant des lubies neuropédagogiques de la rue de Grenelle. Bien loin aussi d’un temps long nécessaire à la construction d’une identité professionnelle.
Alors si enseigner est un métier qui s’apprend, comment apprend-t-on le métier de professeur des écoles ? La formation initiale devrait permettre aux PE stagiaires d’être suffisamment outillés dès le début de leur carrière. Exigeant une formation de haut niveau, professionnalisante et polyvalente, le métier nécessiterait, dans le 1er degré, un accompagnement plus fort à l’entrée de carrière. La faiblesse de cet accompagnement, qui a cours pourtant dans de nombreuses autres professions, nuit à la qualité de la formation initiale. « Ce qui est compliqué, c’est d’être seule à intervenir au niveau du groupe classe », confirme Léa Godin, jeune enseignante à La Chapelle-sur-Loire (Indre-et-Loire). Elle se souvient pourtant « avoir toujours travaillé en binôme et pratiqué un travail d’équipe très important » lors de sa première expérience professionnelle d’éducatrice spécialisée.

Retrouver le lien entre formation et recherche

Pour mettre en œuvre un véritable cursus diplômant et professionnalisant, le SNUipp-FSU propose un pré-recrutement dès l’année de L1, deux années en tant que fonctionnaire stagiaire, après un concours placé en fin de L3, une année T1 avec un mi-temps en classe et une formation continuée en T2. Le parcours préparatoire au professorat des écoles, proposé par la rue de Grenelle à l’issue de la Terminale, est loin de répondre à cette ambition. Par ailleurs, la réforme du CAFIPEMF (certificat d’aptitude aux fonctions d’instituteur ou de professeur des écoles maître formateur) signe le projet d’une école réduite aux apprentissages fondamentaux et dénué de lien entre formation et actualité de la recherche en éducation. « Il y a un point de vigilance à avoir sur le rythme des réformes et sur les dialogues qu’elles induisent pour l’ensemble des acteurs », souligne Samuel Rénier, maître de conférences en sciences de l’éducation à l’Université de Tours . « Si on souhaite qu’une réforme aboutisse, il faut la construire collectivement. Ce changement de culture me semble encore, probablement, à construire. »

Le recul d’une année supplémentaire pour le passage du concours risque de peser sur la démocratisation
de l’accès au métier et sur son attractivité déjà dépréciée.

Plus de temps

Être dans une classe ne suffit pas à se former. La crise sanitaire l’aura démontré, enseigner est un métier de conception qui nécessite une formation initiale de haut niveau. Le SNUipp-FSU porte l’ambition d’une entrée progressive dans le métier avec des allers-retours entre la théorie, en lien avec l’ensemble des travaux de la recherche, et la classe. Des analyses réflexives, des pratiques pédagogiques observées ou pratiquées sont nécessaires pour apprendre les postures et gestes professionnels et ainsi permettre la construction d’une identité professionnelle. Une formation disciplinaire, didactique, scientifique et pédagogique de qualité doit donner accès à l’étude de tous les champs disciplinaires sans hiérarchisation, ni centrage sur les fondamentaux. Enseigner à l’école primaire nécessite d’être polyvalent et d’avoir une connaissance du développement de l’enfant sur l’ensemble de sa scolarité ainsi que des processus d’apprentissages. Cela demande du temps. Il est nécessaire de sortir de la logique d’emploi dans laquelle le ministère de l’Éducation nationale enferme les futurs enseignants et enseignantes.

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