Jouer avec les mots
Mis à jour le 27.04.23
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Reportage à Bourges où la poésie c'est du pain quotidien
À l’école élémentaire Nicolas Leblanc à Bourges (Cher), la poésie c’est du pain quotidien.
« Écrire deux phrases avec les mots frontières, assez, forêt, mer, rivière, hiver ». En ce début de matinée, les élèves de CE1-CE2 d’Anne-Catherine Delprat se lancent, après deux multiplications, dans un premier travail d’écriture. L’école, dont l’équipe est engagée en poésie tout au long de l’année, a été labellisée « École en poésie » par l’OCCE, Office central de la coopération à l’école, il y a deux ans.
« Nous faisons de la poésie au quotidien, explique l’enseignante. Dans la classe, c’est un mode d’expression mais aussi un outil d’apprentissage et une ouverture sur le monde. Cela fait beaucoup pour le climat de l’école ». En début d’année, des petits mots sont sortis de petites boîtes : crayon, fraise, salade… trois mots pour construire une phrase, ça commence tout doucement. « Au départ, c’est rude et ils rient beaucoup, raconte Anne-Catherine. Ils mettent du temps à s’autoriser à jouer avec les mots. Doucement, on trouve des inférences entre ce que l’on voit et ce que l’on ressent. Ce n’est pas un travail normé, mais plutôt une sorte de bain ».
Souvent liés au projet de classe du moment, les travaux d’écriture partent de notions, de textes d’auteurs ou d’œuvres d’art. « De la description à la poésie via l’oralisation, on cherche à aller vers quelque chose de plus léger, explique-t-elle. Qu’est-ce que je pourrais changer pour que cela devienne de la poésie ? ». Des ateliers d’écriture et d’écoute, des lectures régulières, une fois par semaine un « jogging » d’écriture, des résumés, des suites mais aussi des mises en voix et des brigades poétiques, petites équipes chargées de colporter des poèmes dans d’autres classes. « La semaine dernière, un poète de "Poètes en Berry" est venu offrir ses poèmes aux élèves. Lors d’un atelier, il leur a expliqué la transmission des émotions, comment "envoyer" leurs poèmes », rapporte l’enseignante.
Transmission
Puis, chacun et chacune se replonge dans les poèmes écrits dans la cadre du « Printemps des poètes », dont le thème cette année est « frontières », et peaufine sa production. « À quoi ça sert la frontière ? La pluie la traverse quand il pleut averse. À quoi ça sert la frontière à part séparer père et mère », a écrit Émile. Ce fut un travail de longue haleine entre collecte de mots, recherche de rimes et tâtonnement dans l’écriture. « Ils apprennent à observer et à manipuler les mots dans une démarche artistique pour exprimer leur pensée, témoigne l’enseignante. On travaille dans une balance entre l’écriture et le dire. La poésie est à transmettre, elle sera lue et il faut que cela soit compréhensible par rapport à ce que l’on veut exprimer. »
Lors de la présentation aux parents, les poèmes recopiés sur des papiers colorés seront accrochés dans la cour et offerts puis « lancés » au mégaphone des deux côtés d’une frontière matérialisée. Certains seront enregistrés par « Studio Zef », la radio de l’OCCE. Pour que la poésie soit une fête pour tout le quartier, les élèves de CP offriront leurs poèmes aux résidents d’un EHPAD, établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes., tandis que les plus grands iront déposer les leurs sur les pare-brises des voitures ou dans les boîtes aux lettres des habitants.
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