La retraite à reculons
Mis à jour le 18.06.22
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Interview de Michaël Zemmour, maître de conférences en économie
Il l’avait annoncé durant sa campagne. Désormais réélu, Emmanuel Macron maintient son projet de reculer l’âge légal de départ à la retraite même si son gouvernement tente de rassurer l’opinion publique à l’approche des élections législatives. Il entend allonger les carrières non pas pour faire face au vieillissement programmé de la population mais pour financer des mesures de « Progrès social ». Plutôt que de rétablir une justice fiscale de devrait reculer.
Un projet pénalisant
Sur le plan social, un nouveau recul de l’âge de départ à la retraite produirait une dégradation des conditions de vie pour les seniors et alourdirait la facture pour l’État (allocations chômage, minima sociaux, pension d’invalidité). Cela pénaliserait les populations les plus fragiles. En effet, selon l’INSEE*, 25 % des plus pauvres sont déjà morts à l’âge de la retraite. Avec souvent des carrières incomplètes, les femmes aussi seraient fortement pénalisées. En outre, durant ces dernières décennies, les prix ont évolué moins vite que les rémunérations. Avec des retraites indexées sur l’inflation et non sur les salaires, les personnes partiront avec une pension qui, en moyenne, représentera un pourcentage de moins en moins élevé de leur dernier salaire. Pourtant, d’autres solutions sont possibles pour financer une retraite de haut niveau à 60 ans (voir interview ci-dessous).
*Données 2018
MICHAËL ZEMMOUR, maître de conférences en économie à l’université Paris 1
Reculer l'âge de départ à la retraite, une bonne idée ?
Cela ne répond pas aux questions posées actuellement, en termes de conditions de travail, d’emploi des seniors ou d’équilibre financier du système. Cela peut avoir pour effet de faire travailler une partie de la population plus tard au détriment de la santé et d’augmenter le sas de précarité entre l’emploi et la retraite qui concerne aujourd’hui plus de quatre personnes sur dix. Avec le passage de la retraite de 60 à 62 ans, le seuil de précarité s’est allongé. Une partie des personnes déjà sans emploi à 62 ans, voire à 61 ans, risquent de « patienter » d’autant plus longtemps dans des conditions dégradées.
Des alternatives ?
Il faut accompagner cette augmentation démographique par des moyens supplémentaires pour empêcher la dégradation programmée du niveau des pensions. Il faudrait un relèvement très progressif des taux de cotisation de l’ordre de 0,2 point par an. Une opération qui est quasiment indolore surtout s’il y a un dégel du point d’indice. Des éléments de rémunération ne font pas l’objet actuellement de cotisations comme les primes de la fonction publique ou l’épargne salariale du privé.