ça bulle à l'école

Mis à jour le 28.01.20

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Reportage à l'école Alain Fournier d'Angoulême, capitale de la BD

À l’école Alain Fournier d’Angoulême, la bande dessinée s’invite dans les apprentissages.

Des Schtroumpfs qui dégringolent les escaliers des quais, Spirou et Seccotine qui font l’accueil dans le hall, tandis que l’obélisque Goscinny est bien dressée sur le parvis... oui sans nul doute c’est bien la gare d’Angoulême, capitale française de la bande dessinée. Amélie Peytour, Angoumoisine de naissance, directrice de l’école élémentaire Alain Fournier rep+ située dans le quartier ouest de la ville, est tombée dans la potion quand elle était petite. Ce matin, cette classe de CM2 de 16 élèves, un faible effectif car elle accueille deux mal-voyants François et Mykel et, Elliess, un élève d’ITEP en inclusion, écoute avec attention les consignes de la maîtresse.         « Vous avez fait une séance de badminton lundi matin avec Jean. Vous allez écrire le compte-rendu de cette sortie sous forme de bande dessinée. Maximum une planche. Et vous avez le choix entre : écrire les règles du jeu, raconter une séance ou inventer une histoire avec comme thème le badminton ». Ces comptes-rendus de sortie en BD sont des exercices familiers pour ces élèves. Au mur ceux de la visite au FRAC (Fonds Régional d'art contemporain) et ceux du projet Odyssée dans lequel la classe est engagée.

Le match galactique de François

Faciliter l’écriture

« Les élèves ont des difficultés à entrer dans l’écrit. Cela leur demande beaucoup d’énergie car ils doivent imaginer le récit, le structurer, l’écrire... le lendemain d’une visite, avec le compte-rendu en BD, ils visualisent mieux. On le fait en CP, pourquoi pas avec des plus grands ! Avec la BD et une commande, il y a deux entrées, l’une littéraire et l’autre artistique ». D’ailleurs, malgré les recommandations récurrentes de l’enseignante, réfléchir à l’histoire sur le cahier de brouillon, l’écrire en quelques mots puis seulement après faire un brouillon en BD... avant la version définitive sur les grandes feuilles cartonnées, la plupart commencent directement le travail avec les cases. Jeanne a choisi les règles du jeu « Je vais faire entre 6 et 8 cases », explique-t-elle. Elle a préparé les deux premières cases avec quelques éléments narratifs avant de s’attaquer aux premiers croquis. Pour Bredha, ce sera une histoire inventée dont le titre (car il en faut un) sera « Badminton sur Mars avec des extraterrestres ». Amélie et Christelle, l’AESH qui accompagne François et Elliess, circulent entre les élèves. Souvent ils commencent sans vraiment savoir où ils vont, sans avoir imaginé une fin à leur histoire. « D’accord, ils sont sur une autre planète et ils jouent au badminton mais ça ne fait pas une histoire », explique Amélie à Sofiane. Et l’enseignante de rappeler le schéma narratif avec un début, un événement, la résolution du problème et une fin.

la BD en classe    

Dessiner les émotions

Amélie s’attarde aux côtés de François dont les personnages mènent en badminton une guerre intergalactique. « Là ton personnage est énervé, il faut que le texte soit plus gros », lui précise l’enseignante. «Et puis si tu écrit Ah, c’est différent de Ahhhhhhh. Quels sentiments veux-tu exprimer avec les onomatopées ? », lui demande-t-elle. « La planche de François est très riche. Il utilise différents plans : gros plan, plan serré, plan large... On demande beaucoup de rigueur aux élèves sur les échelles, la taille des objets ». Elle précise à Mykel que chaque personne doit avoir sa propre bulle pour parler. Stéphane Lastère, référent numérique et grand spécialiste de la bande dessinée, est déjà venu deux fois dans la classe animer des ateliers sur la mise en mouvement des personnages et les codes du dessin. « Cette année nous ne participons pas au concours du festival de la bande dessinée d’Angoulême mais nous irons passer une journée pour voir un film et des expos », explique Amélie. La classe est aussi inscrite à quatre ateliers à la Cité de la BD, sur « les personnages » ou « comment écrire une histoire en cases ».
La bande dessinée, ils en lisent aussi bien sûr. L’école possède quelques séries, privilège des classes qui participent au jury du festival « Prix des écoles d’Angoulême ». Il y a deux ans, les auteurs de la BD Les enfants de la résistance sont venus dans la classe qui menait un travail sur le seconde guerre mondiale. Le projet Odyssée que mène la classe cette année a pour thème « Impact de l’homme sur l’environnement ». Les élèves des quatre écoles concernées (deux d’Angoulême, une au Maroc et la dernière en Egypte) apprendront à mieux se connaître à travers des autoportraits en BD mais feront aussi découvrir en dessins à leurs camarades le patrimoine local et culinaire d’Angoulême, ville patrimoine de l’Unesco. Mais pas d’exclusive, tous les genres en lecture et en écriture ont leur place dans la classe d’Amélie.

la BD en classe

"Avec la bande dessinée, il y a deux entrées, l'une littéraire et l'autre artistique."

Stéphane Lastère est PE et référent numérique en Charente. Membre du comité de pilotage du PREAC BD, il a produit différents articles, formations et outils pédagogiques autour de la BD en classe.

Stéphane Lastère

Quelles particularités de la lecture de BD ?

Ces récits ont des spécificités et leur lecture nécessite l’apprentissage de certains codes, comme le sens de lecture à l’intérieur d’un album, d’une planche, d’une case, le code des phylactères aussi car selon le type de bulles, on appréhende différemment ce qui est écrit : pensée, parole, chuchotements, cris. On différencie la lecture des bulles qui est du récitatif ou du dialogue avec celle des cartouches qui est du descriptif. Mais la BD c’est avant tout l’art de l’ellipse et du hors champ, « l’art de l’invisible », comme l’écrit l’auteur Scott McCloud. Une compréhension complexe, où l’imagination du lecteur est à l’œuvre, dans, hors et surtout entre les cases.

Comment aborder l’écriture de BD ?

La BD suit un schéma narratif et le travail d’écriture commence souvent en classe par un scenario puis un storyboard. On peut aussi l’aborder avec des contraintes : l’oubapo est une déclinaison de l’oulipo à la bande dessinée. C’est intéressant d’imposer une situation de départ ou d’arrivée et de créer une BD à partir de ça. Si on écrit une strip, une seule bande, on peut partir de la chute et remonter le récit avec le nombre de cases comme contrainte. On travaille l’imagination mais aussi l’interprétation en passant d’une histoire à un dialogue ou en changeant de personnages.

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