Éduquer avec tact

Mis à jour le 10.09.18

2 min de lecture

Eirick Prairat défend le tact en éducation, un art pédagogique et une vertu éthique

Eirick Prairat enseigne la philosophie de l’éducation à l’université de Lorraine. Il est également chercheur associé au Groupe de recherche sur l’éthique de l’éducation (GREE) de l’université du Québec à Montréal.
Éduquer avec tact (ESF Sciences humaines, 2017) est son dernier ouvrage.

Qu’est-ce que le tact pédagogique ?

C’est la capacité à apprécier rapidement une situation et à décider. Le tact est proche de ce qu’Aristote appelle le « coup d’œil ». Il n’indique pas seulement ce qu’il importe de faire, il indique aussi un « comment faire », une manière de s’y prendre. Et, il en est ainsi parce que le tact noue une capacité d’empathie, c’est-à-dire une capacité à sentir ce qui est en train d’advenir, et une aptitude à juger. Il introduit dans l’art d’enseigner l’idée de l’appréciation juste et rapide de ce qui est en train de se passer. Car il faut bien comprendre que l’enseignement est un art de marier planification méthodique et décision rapide, mise en ordre raisonnée et juste improvisation. 

Vertu ou savoir-faire ?

Il est l’un et l’autre. Il est un savoir-faire au sens où je viens d’en parler, c’est-à-dire aptitude à s’ajuster à des situations particulières. Il est aussi une vertu car il est à la fois sens de l’adresse et sens de l’à-propos. Sens de l’adresse car quand je parle à Paul je ne parle pas à Suzanne et quand je parle à Suzanne je ne parle pas à Mohammed. Et sens de l’à-propos : sens de ce qui doit être dit et comment cela doit être dit, mais aussi et surtout sens de ce qui doit être tu. Le tact est vertu de la relation, vertu du comment. Et en enseignement, comme en éducation, la manière dont on dit et dont on fait les choses est tout aussi important que ce que l’on dit et fait.

Peut-on l’apprendre ?

Je crois que le tact se découvre et s’éprouve dans l’expérience au contact notamment de personnes elles-mêmes douées de tact. D’où l’importance d’une véritable formation éthique des professeurs. Cette formation doit proposer des activités spécifiques comme réfléchir sur des situations exemplaires ou encore s’exercer à juger à partir de situations "dilemmatiques". Mais une formation éthique doit, au-delà des activités particulières qu’elle propose, savoir organiser le groupe de formés en ce que la philosophe américaine Nel Noddings a appelé une « communauté a-sermentée», c’est-à-dire en une communauté animée par un esprit de compréhension et de bienveillance réciproques. Une formation éthique n’est donc pas seulement un ensemble d’activités à expérimenter, elle est aussi une expérience à vivre.

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