« Une formation insuffisante »

Mis à jour le 13.05.19

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Marie-Ange DAT est maîtresse de conférences en sciences du langage (Nantes)

En quoi la formation des PE en didactique des langues a-t-elle évolué ? 

Dire que la formation des PE a évolué serait une contrevérité. Au mieux, elle a stagné. Le nombre d’heures dédiées à la formation des professeurs des écoles a diminué et cela a autant affecté l’enseignement de la didactique que les langues elles-mêmes. Bien entendu ma vision est partielle, je n’ai pas la prétention de parler pour toutes les Espé de France mais les retours sont assez unanimes. De toute façon, la forme de la préparation au métier de professeur des écoles, avec une préparation au master 2 et le concours sur deux ans, rend l’entreprise périlleuse d’emblée. Il est donc très difficile d’assurer une formation complète. J’ajouterais aussi que l’on reste très souvent sur l’aspect technique de l’enseignement, on en écarte plus la vision philosophique. Pourquoi enseigner une langue vivante étrangère, ce que cela dit de la vision de l’Autre. Finalement, la baisse du volume horaire n’est pas la seule raison de la faiblesse de la formation.

Selon les Espé, la carte de formation est différente. Pourquoi ? 

À l’époque de l’IUFM, c’était déjà le cas. Disons qu’à la naissance des Espé, les habitudes ont perduré. L’organisation même de l’université, qui est autonome, explique cette différence. Les maquettes de master sont validées à un niveau local, toutes les facultés construisent les leurs. Mais il est vrai qu’il y a une volonté d’harmonisation, au moins au sein d’une même académie, de l’offre de formation. Il y a un autre paramètre qui me semble très important à prendre en considération. Les moyens humains. Les formateurs qui préparent les PE viennent d’horizons variés, du secondaire, du primaire ou encore de la recherche. Chacun a des compétences assez différentes et chacun fait avec ce qu’il est, avec ses manques.

La formation est-elle suffisante selon vous ? 

Non, elle est tout à fait insuffisante. On manque de temps. D’ailleurs, les étudiants sont régulièrement insatisfaits, ils éprouvent de réelles difficultés à cumuler master 1, master 2, concours et terrain à mi-temps. Ils subissent une forte pression avec la titularisation en bout de parcours. Au niveau de l’enseignement des langues, ils arrivent avec un niveau très disparate, certains avec un niveau inférieur à B1 alors que le niveau B2 est attendu. Par manque de temps, nous sommes obligés de faire comme s’ils avaient tous le niveau nécessaire et on se consacre à la partie didactique et pédagogique. C’est très frustrant, on fait au mieux mais avec énormément d’insatisfaction et la sensation de toujours tout faire dans l’urgence. Nous avons donc besoin de plus de temps et de formateurs qui aient des compétences croisées terrain-recherche. Contrairement aux annonces ministérielles, les compétences de terrain ne suffisent pas, tout comme d’ailleurs la recherche seule ne suffit pas. Et surtout, il faut plus de stabilités dans les formations des futurs PE alors que les maquettes doivent s’adapter aux fantaisies des ministres successifs.

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