Quelles priorités pour cette rentrée ?
Mis à jour le 05.09.20
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En cette rentrée, du fait du confinement et de la reprise partielle des cours en juin, les enseignantes et les enseignants accueillent des élèves qui ont de fait manqué d’école. Si le ministère prône l’individualisation, comme solution miracle, d’autres voix se font entendre.
Malgré une période sans précédent d’interruption de l’école, le ministère ne déroge pas à ses lubies et la rue de Grenelle continue de privilégier l’individualisation des apprentissages plutôt que l’apprendre ensemble. Les évaluations standardisées au CP CE1 sont de nouveaux obligatoires et des tests de positionnement sont proposés aux autres classes. Ces outils sont présentés comme l’alpha et l’oméga pour débuter les apprentissages dans de bonnes conditions. Si ces outils peuvent parfois apporter des éléments de compréhension sur le niveau des élèves, sont-ils la priorité ?
D’autres voix s’élèvent
Associations complémentaires de l’école, chercheurs, syndicats et association de parents énoncent d’autres priorités (GFEN, CRAP, Nathalie Mons, pétition ) . Récréer du collectif, favoriser un climat serein, renforcer le sentiment d’appartenance au groupe classe, développer l’esprit d’équipe autant de compétences qu’il est indispensable de développer à l’école. En effet, la classe est le lieu qui permet de développer chez tous les élèves des compétences, de cheminer et de grandir ensemble. Les moments de verbalisation, de discussion sont autant d’atouts pour s’engager socialement et cognitivement dans des activités scolaires. Les élèves ont besoin de coopérer, d’encouragement, d’entraide, d’explications, de questionnements, de co-construction, de déstabilisation, de confrontations…et non d’évaluations qui ne font pas sens en ne s’inscrivant pas dans la progression mise en place par les enseignantes et enseignants des classes.
Comme le disait Célestin Freinet « L’enfant n’aime pas le travail de troupeau auquel l’individu doit se plier comme un robot. Il aime le travail individuel ou le travail d’équipe au sein d’une communauté coopérative. » Cette rentrée hors norme implique encore plus que d’habitude de redonner confiance en chacun des élèves, de favoriser l’évaluation formative, de permettre à tous de progresser sans être dans la performance et la concurrence.
D’autres choix sont possibles
En Belgique, des choix différents sont à l’œuvre. Le ministère de l’éducation a banni les évaluations sommatives en cette rentrée et laisse toute latitude aux établissements scolaires pour identifier les difficultés et retard d’apprentissage. La priorité est donnée à l’observation des élèves, aux évaluations formatives, à la concertation croisée avec les équipes enseignantes de l’année scolaire précédente.
Personnaliser les apprentissages, ce n’est pas les individualiser mais les inscrire dans un contexte où apprendre est un processus personnel qui se nourrit des interactions avec les autres apprenants. Dans un article sur la pédagogie différenciée, P. Meirieu dit qu’il n’a jamais conçue celle-ci « comme une mécanique technocratique qui soumettrait tout élève à des batteries de tests permanents permettant d’imposer à chacun les connaissances et les méthodes qui correspondraient strictement à son niveau et à ses besoins. Et il ajoute « Cette vision, qui nourrit très largement aujourd’hui le discours dominant sur « l’individualisation, est, tout à la fois, une erreur et une faute. Une erreur parce qu’il n ‘y a pas de réponse qui se réduise à une « remédiation technique ». Une faute, car « en cherchant systématiquement la solution pédagogique dans le passé de l’élève, on risque de l’y enfermer. (…)
De nombreux travaux (Marie Toullec-Théry, Roland Goigoux , conférences de consensus du CNESCO ont montré que l’individualisation à outrance pouvait constituer un facteur de renforcement des inégalités.
La priorité donnée aux évaluations standardisées, aux tests de positionnement et aux protocoles de remédiation individualisée n’est pas une bonne nouvelle pour celles et ceux qui sont attachés à la réussite de tous les élèves.