Canopé sapé à la racine ?

Mis à jour le 02.06.20

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Partenaire incontournable des équipes éducatives, le réseau Canopé est menacé.

Partenaire incontournable des équipes éducatives, le réseau Canopé est menacé, victime d’importantes coupes budgétaires. Ressources pédagogiques papier ou numérique, formations… c’est pourtant un outil important pour les enseignants.

Le réseau Canopé est appelé à disparaître. C’est ce que beaucoup craignent suite aux annonces et coupes budgétaires annoncées en décembre dernier par le gouvernement. Pourtant, c’est un partenaire particulièrement apprécié par tous les acteurs de l’éducation. Beaucoup le côtoyaient déjà sous le nom de Scerén CNDP-CRDP – Centre national de documentation pédagogique, et les plus anciens sous celui d’IPN – Institut pédagogique national. Quelle que soit son appellation, il est connu de tous.
En tant qu’opérateur de l’Éducation nationale, le réseau Canopé est chargé d’une mission de service public de l’État par lequel il est financé. Il est l’héritier d’une longue tradition d’établissements publics chargés de produire et d’éditer des contenus pédagogiques à destination des personnels enseignants. Il les accompagne depuis plus de soixante-dix ans en les formant et en mettant à leur disposition revues et ressources éducatives qui se déclinent dans cinq domaines : la pédagogie, le numérique éducatif, l’éducation à la citoyenneté, les arts, culture et patrimoine et la documentation. À ce jour, présent sur l’ensemble du territoire de la métropole mais aussi en outre-mer, le réseau Canopé, c’est près de 1400 salariés répartis sur un peu plus de 100 ateliers Canopé.

Ce dispositif a su évoluer avec son temps, s’adaptant aux différentes évolutions technologiques et proposant des outils pédagogiques sans cesse renouvelés. En 2015, il est profondément restructuré, son action principale s’oriente dès lors vers l’édition de ressources pédagogiques transmédias : imprimé, web, mobile, télévision. Son objectif est clairement affiché sur son site : « conjuguer innovation et pédagogie pour faire entrer l’École dans l’ère du numérique ».
Mais le réseau Canopé, c’est aussi un appui majeur pour les collectivités territoriales, et cela sous plusieurs aspects. Sur le terrain, il les accompagne pour le recrutement et la formation de tuteurs pour élèves en difficultés, en organisant des concours à visée pédagogique avec collèges et lycées ou encore en réfléchissant avec elles sur l’aménagement du bâti scolaire. « Il offre un service d’accompagnement pédagogique pour le déploiement de leurs plans numériques dans les établissements, sans doute bien utile pour améliorer l’impact de ces plans en termes d’usages », indiquait d’ailleurs un rapport de la cour des comptes de 2019. Un rapport qui estimait aussi que « cette offre de services contribue sans doute à assurer la compatibilité des plans numériques locaux avec la vision pédagogique du ministère ».
Alors quand la rue de Grenelle a annoncé la baisse d’environ trois millions d’euros de la subvention de fonctionnement de l’opérateur, assortie d’une réorganisation de ses missions, ça a été une surprise pour beaucoup. Et pas une bonne. Personnels du réseau, syndicats d’enseignants dont le SNUipp-FSU, collectivités territoriales se sont tout de suite mobilisés. Depuis, les salariés ont manifesté leur colère lors de plusieurs journées de grève et ont mis en ligne une pétition, signée par près de 15000 personnes.
Alors que la crise sanitaire sévit, et que les enseignantes et enseignants sont obligés d’enseigner à distance, le réseau Canopé montre une fois de plus son utilité. À leurs côtés depuis des décennies, c’est tout naturellement vers ses ressources en ligne qu’ils se sont dirigés. Le site du réseau, offrant toutes les garanties de sécurités et RGPD-compatible, apporte à la profession des outils dont ils savent la pertinence pédagogique. Autant d’éléments que la FSU a rappelé dans un courrier qu’elle a adressé au Ministre le 27 avril dernier.

Nadège Gohier est archiviste pour le réseau et porte-parole des personnels

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Comment expliquer une telle coupe dans le budget ?

On se l’explique très difficilement. En 2012, nous avons subi une très grosse restructuration. À cette occasion, nous avons pris un virage très important qui a demandé beaucoup d’investissement humain et financier, puisqu’il était financé sur les fonds propres du réseau. On nous reprochait de ne pas être rentables, question toujours étonnante lorsqu’on parle de service public... Le modèle de budget que nous avons adopté ces trois dernières années montre que nos efforts commencent à porter leurs fruits. Les déficits se réduisent, le budget 2019 indique qu’il n’était plus que de deux millions d’euros là où le ministère en attendait quatre. C’est donc complétement incompréhensible au niveau financier. Quant au virage du numérique cela fait très longtemps qu’on l’a pris. Depuis la fin des années quatre-vingt-dix, nous produisons du numérique, ce n’est donc pas un problème d’adaptation au support. À titre d’exemple, pour chaque ressource éditée en papier, nous proposons un site web d’accompagnement.

Les conséquences pour les utilisateurs ?

Avant 2015, les CRDP étaient indépendants et fonctionnaient en régions académiques. Ils étaient présidés par les recteurs d’académie. Difficilement, le CNDP essayait de coordonner l’ensemble. Au 1er janvier 2015, Réseau Canopé est devenu un établissement unique avec un socle commun de services dans les 100 Ateliers Canopé du territoire. On travaille en réseau, et de la manière la plus cohérente possible. Ce qui est menacé aujourd’hui, c’est cela. La restructuration que l’on cherche à nous imposer aujourd’hui, c’est un retour vers ce dont on nous disait que cela ne fonctionnait pas. Selon les régions, les services seront différents et certains Ateliers Canopé risquent de disparaître.

Les conséquences sociales pour les salariés ?

On les mesure difficilement. 800 salariés, dont des agents administratifs, des enseignants détachés ou encore des contractuels sont menacés puisque le maintien des Ateliers Canopé, dépendra des rectorats. Autre point, au 1er novembre, il a été acté la perte de dotation de 55 emplois temps plein travaillés, c’est-à-dire de 120 à 150 salariés. Dès à présent, cela provoque le départ de nombreux collègues dont on n’a pas renouvelé le détachement.

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