EMI
Mis à jour le 10.05.22
min de lecture
Éducation aux médias et à l’information : la citoyenneté à la Une
À l’heure où tout le monde est susceptible de produire de l’information, un enseignement transversal consacré aux médias et à l’information est reconnu aujourd’hui comme essentiel. Il vise à aider l’élève à trier, décrypter et mettre en perspective des contenus multiformes toujours plus nombreux et accessibles.
Quel rôle doit jouer l’école pour aider les élèves à appréhender des flux d’informations multiformes toujours plus massifs, accessibles et rapides ? Comment apprendre aux futures citoyennes et citoyens à prendre de la distance avec des contenus produits par des acteurs, de plus en plus nombreux, autres que les professionnel•les de l’information ? Tels sont les principaux enjeux de l’Éducation aux médias et à l’information (EMI), un enseignement transversal dont l’utilité fait l’objet d’un large consensus au sein de de la communauté éducative. Il apparaît en effet fondamental, d’éduquer les enfants du primaire à identifier les sources, à distinguer les savoirs de la croyance, les faits des opinions, à lire avec critique les infos, les images… et à pouvoir disposer d’une autonomie d’information.
Ebauché dans les années 1970 et 1980 lors de plusieurs conférences internationales, le concept d’éducation aux médias et à l’information a commencé à s’intégrer progressivement au parcours citoyen de l’élève à partir de 2016, les attentats contre Charlie Hebdo en 2015 ayant accéléré la prise de conscience de l’enjeu démocratique de cet enseignement dont la question de la liberté d’expression. Six ans plus tard, dans la foulée du rapport Bronner dressant un état des lieux de la désinformation sur les réseaux sociaux, le ministère de l’Éducation nationale précise dans la circulaire du 24 janvier 2022 que l’EMI doit occuper une place « au cœur du projet éducatif de l’École » et en définit les modalités organisationnelles et pédagogiques.
Démêler le vrai du faux
Même s’ils peuvent désormais s’appuyer sur l’expertise et les ressources du Centre pour l’éducation aux médias et à l’information (CLEMI), les PE déplorent souvent un manque de temps, de moyens et de formation pour mettre en œuvre cet enseignement parmi une liste de priorités qui ne cesse de s’allonger. Le SNUipp-FSU estime que l’EMI ne doit pas reposer sur les seules injonctions hiérarchiques, mais passe par l’équipement de chaque classe, une assistance continue, une solide formation initiale et continue, des enseignant•es bénéficiant échanges avec les familles.
Pour autant, les initiatives de terrain donnent des perspectives encourageantes. Ainsi, les élèves de CM2 de l’école Camus du Portel (Pas-de-Calais) ont réalisé un micro trottoir sur le réchauffement climatique dans le cadre d’un projet local de webradio. « C’est aussi faire de l’histoire, de la géographie, des sciences d’une façon plus active et ludique », témoigne leur enseignante Ludivine Villez. Cette première expérience de production a également permis aux élèves de se confronter à des problèmes d’expression, de présentation, de synthèse et de vérification des informations recueillies. À Viry-Châtillon (Essonne), les classes de CM1 de l’école Jules-Verne ont enquêté pour savoir si la commune avait été équipée ou pas d’un télésiège dans les années soixante. « Nous avions besoin d’un déclencheur pour les lancer dans l’enseignante Pauline Laborde. Nous avons donc construit la séance pour qu’ils et elles se retrouvent face à une situation problème et aient besoin de vérifier l’info ».
Développer l'esprit critique
Des spécialistes de l’éducation et de l’information plébiscitent, en outre, l’EMI comme un vecteur pédagogique essentiel pour développer l’esprit critique de l’élève et consolider les savoirs. « Ils doivent identifier les bonnes sources, les croiser et enfin, hiérarchiser l’information. La production médiatique est un mode d’action très pertinent pour comprendre et consolider les compétences en EMI », note Xavier Gillet, ancien journaliste et PE détaché auprès du CLEMI. Pour Sophie Jehel, maîtresse de conférences en Sciences de l’information et de la communication, l’EMI constitue également l’occasion pour l’enfant confronté de plus en plus tôt à l’usage des réseaux sociaux de se poser des questions relevant de l’éthique. « Face aux images et messages reçus, interroger les émotions, les intentions, les publications permet l’autonomisation, la liberté intellectuelle, en mesurant l’écart entre ce que la plateforme et le réseau de contacts incite à penser et ce que l’usager pense lui-même ».
LIBERTÉ CONSTITUTIONNELLE
« La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout citoyen peut donc parler écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi. » L’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, repris dans la Constitution, s’impose comme un fondement de la société démocratique française. La liberté d’expression contient donc une double responsabilité : le droit de communiquer ses idées et la responsabilité de ce que « j’écris ». Garante d’un pluralisme des débats citoyens, elle pose aussi la question des moyens de son exercice. Internet marque une révolution en ne réservant plus l’expression qu’à celles et ceux accédant aux médias. Cela implique donc une formation des futurs producteurs et productrices.