Investiguer pour éviter les infox
Mis à jour le 10.05.22
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Reportage à Viry-Châtillon où vérifier les informations est devenu un réflexe
Dans les classes de CM1 de l’école Jules Verne de Viry-Châtillon (Essonne), vérifier une information est devenu un réflexe.
Y avait-il un télésiège à Viry-Châtillon dans les années soixante ? Les élèves de CM1 des classes de Pauline Laborde et Sophie Sureau n’y croient pas. Et leur incrédulité est légitime. Comment croire qu’il y a encore quelques années, un télésiège survolait le lac de cette petite ville urbaine de l’Essonne ? Dans cette « hyperclasse » de quarante-six élèves comme aiment à l’appeler les deux enseignantes qui travaillent constamment ensemble, questionner une information est un réflexe. C’est lors d’une séance sur les différents modes de transport en montagne que Sophie leur parle du télésiège qui survolait le lac castelvirois. Un peu comme une info donnée au détour d’une phrase. Pourtant, c’était l’objet même de cette séance d’éducation aux médias et à l’information (EMI) et non de géographie comme l’ont cru les élèves… « Nous avions besoin d’un déclencheur pour les lancer dans une démarche d’investigation, explique Pauline. Nous avons donc construit la séance pour qu’ils se retrouvent face à une situation problème et aient besoin de vérifier l’info ». La réaction des élèves est immédiate : « mais il n’y a pas assez de neige ici » rétorque Adeline*, « on n’est pas à la montagne ! » ajoute Omar*. « Vous ne me croyez pas ? » leur demande Sophie, « Est-ce que je raconte n’importe quoi ou ai-je raison ? Comment fait-on pour savoir ? ». Nina* lève la main et lui répond : « on doit vérifier ton information ! ». Et quand les élèves de CM1 parlent d’information, ils utilisent le terme journalistique. « Qu’est-ce qu’un média ? Qu’est-ce qu’une information ? » sont des interrogations auxquelles ils ont été confrontés lors de plusieurs séances d’EMI en amont de celle-ci et auxquelles ils ont répondu dans un podcast diffusé sur la webradio de l’école. « Une informa-tion, c’est quelque chose de vrai, de récent et qui intéresse un maximum de personnes », rappelle Amina*.
Croiser trois sources
Très rapidement, les enfants s’organisent. « On peut demander à des témoins qui vivaient là avant », suggère Nina, « On pourrait vérifier sur Internet ou un journal », ajoute Amine*, « On peut demander à la mairie », complète Souleyman*. Ils ont leurs trois sources ; ils savent que pour vérifier une information, il faut en croiser trois au minimum. Un groupe est chargé de trouver un témoin. Très rapidement, il pense au directeur de l’école, Hervé Guis-set, qui est « vieux » puisque ses cheveux sont gris… « En effet, il y avait un télésiège quand j’avais votre âge », leur répond-il. Le second groupe téléphone au service des archives de la mairie qui joue le rôle de source officielle dans leur enquête. « C’est tout à fait vrai, le télésiège servait à survoler le lac », leur affirme la responsable. Et pour finir, le dernier groupe effectue des recherches sur Internet et sur les différents médias jugés fiables, comme le quotidien Le Parisien, qui confirment l’information : il y avait un télésiège de 1962 à 1998 à Viry-Châtillon… L’organisation de ces recherches permet de déterminer la véracité des propos. Ce n’était donc pas une infox – ou « fake news » – mais bien une information.
* Les prénoms ont été modifiés