Nature et découvertes en ville
Mis à jour le 03.09.20
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Reportage dans une école en Seine-Maritimeinscrite dans une démarche écologique et éco-citoyenne
Sous l’impulsion d’une enseignante adepte de la pédagogie de projet, les élèves de l’école de Mesnil-Esnard ont décroché un prix coup de cœur de la Main à la pâte grâce à un travail riche et ancré dans le quotidien.
C’est en banlieue rouennaise, dans l’école de Mesnil-Esnard (Seine-Maritime) inscrite dans une démarche écologique et éco-citoyenne, que le projet de la nature en ville de la classe de CM2 a vu le jour. Juste à côté de l’école, des pavillons ont été rasés et remplacés par une grande barre d’immeubles donnant directement sur la cour. « Les élèves, lors de leurs diverses sorties, font le constat que les chantiers se multiplient, les constructions immobilières progressent ou encore que la circulation automobile s’intensifie tandis que disparaissent de grandes parcelles de verdure, des arbres et des fleurs », raconte Christine Blaisot, initiatrice du projet. Il n’en faut pas plus aux élèves pour s’interroger et s’inquiéter de l’avenir qui se dessine « quand cela va-t-il s’arrêter ? ».
Sans découragement et sans avoir une vision pessimiste de la situation, l’enseignante invite les enfants à chercher des explications, observer et réfléchir ensemble.
En quête de réponses
Diminution des espaces naturels et davantage de constructions, comment faire le lien ? « Ancrer les apprentissages dans le quotidien », voilà le leitmotiv de Christine. Elle choisit de partir du monument aux morts pour étudier l’évolution de la démographie et comprendre pourquoi la ville s’est transformée. « Cela a permis d’avoir une entrée pluridisciplinaire où se croisent l’histoire, la géographie, les mathématiques et le français » rapporte-t-elle. Les élèves ont pu ainsi réaliser des graphiques, des plans ou encore des textes et établir des liens entre l’augmentation importante de la population, les nouvelles constructions, l’intensification de la circulation et la disparition des zones naturelles. Avec l’aide d’un spécialiste de la botanique de l’association Cardere (Centre d’action régionale pour le développement de l’éducation relative à l’environnement), les élèves ont également travaillé sur les arbres dans la ville et le coteau calcaire sur lequel est construit le quartier. « Les observations quotidiennes ont permis des débats riches en classe tant sur l’importance de préserver l’écosystème que sur les moyens alternatifs possibles pour se déplacer tel que les transports en commun, le vélo ou la marche à pied. » Christine pousse même les élèves à imaginer un environnement plus respectueux de la nature en faisant du photo-montage. Une occasion que saisit l’enseignante pour étudier l’histoire de la photographie, l’éducation aux médias.
Un investissement qui paye
Selon Christine, la pédagogie de projet est l’une des réponses pour intéresser tous les élèves, les rendre acteurs de leurs apprentissages, mettre en valeur les compétences et savoirs de chacun. Si cela demande beaucoup d’investissement et de temps personnel, le jeu en vaut la chandelle. Tout au long de l’année, elle constate que les élèves sont motivés et apprennent à se connaître. « Avant, cet élève-là, je n’avais pas envie d’être avec lui », précise l’un d’entre eux. Qu’ils travaillent individuellement, en binôme, en groupe restreint, ou encore en grand groupe, les compétences de tous sont au service du projet commun. « Cela permet aussi d’ouvrir l’école vers l’extérieur, de diffuser le projet auprès des familles et de les faire participer », précise Christine.
Au CM2, à Mesnil-Esnard, le plaisir d’apprendre est palpable, l’emploi du temps traditionnel bousculé, les journées paraissent plus courtes et l’envie de revenir à l’école le lendemain est assurée. « Ah ben, on n’a pas travaillé aujourd’hui », se plaisent à dire les élèves qui ne sont pas conscients de la multitude des compétences sollicitées et des apprentissages effectués durant leur journée. Il faudra les échanges entre pairs et les mots de la maîtresse pour qu’ils le mesurent.
Mais une autre motivation anime aussi Christine qui est maîtresse formatrice, celle de « donner envie de monter des projets avec sa classe ». Utilisé comme moyen de diffusion, « le concours de la Main à la pâte permet de partager ses expériences, de montrer que l’on peut faire la classe autrement ». Elle a été primée en 2019. Alors pour toutes celles et ceux qui hésitent encore à se lancer dans la pédagogie de projet, Christine donne rendez-vous à ses collègues dans le réservoir à trésors de la Main à la pâte pour y piocher des idées !
3 questions à Ange Ansour, traductrice, professeur des écoles est fondatrice et directrice des Savanturiers
Pourquoi mener des activités d’observation de milieu urbain avec les élèves ?
Observer un milieu urbain dense amène l’élève à se poser des questions sur la place qu’occupe la nature dans l’espace public. Mais observer en soi n’est pas suffisant, il convient de construire la sensibilisation du regard. Apprendre à regarder de manière scientifique, identifier des critères, quantifier, observer des invariants et l’évolution, construire un raisonnement et une argumentation valides sont les premiers pas vers la construction d’un esprit critique.
Quelle place pour la pédagogie de projet ?
Elle a de réels atouts comme la motivation, le travail collectif, apprendre à se projeter dans le temps ou encore l’ingénierie pédagogique mise en place pour travailler autrement. Mais elle repose aussi sur de nombreux implicites. Il s’agit de ne pas laisser l’enfant deviner. À chaque moment, il doit pouvoir se situer, savoir ce qu’il a mobilisé, quels sont les objectifs, fixer les savoirs et voir ce qu’il produira avec tout cela.
Quel est le rôle de l’école dans l’éducation au développement durable ?
Après les hussards de la République, il est temps d’être les hussards verts de la planète. Une école, où dès le plus jeune âge, sont introduites des notions avec des connaissances qui ne soient pas coupées de l’engagement et d’un esprit critique. Aujourd’hui, il n’y a pas de consensus sur un modèle et les solutions. Il convient d’amener le futur citoyen à avoir tous les éléments pour qu’il puisse prendre des décisions.