Remède ou thermomètre ?
Mis à jour le 24.05.23
1 min de lecture
La dictée, confusion entre évaluation et apprentissage
La tradition de la dictée entretient une confusion entre évaluation et apprentissage, oubliant le lien nécessaire entre orthographe et production d’écrits.
Apparue à l’école en 1837, dans une vogue orthographique visant à « populariser la langue nationale dans les campagnes », la dictée reste encore l’exercice canonique de la discipline. Si les ressources pédagogiques proposent de nombreuses activités possibles, la dictée continue de s’imposer comme l’exercice de référence, que ce soit dans les tests ou dans les prescriptions. Son usage répétitif est présenté comme le moyen de revenir à un prétendu âge d’or d’excellence en orthographe.
Eveline Charmeux, grammairienne, interroge cette évaluation, dont la notation est une soustraction qui ne retient que les fautes. Selon elle, la dictée ne prend pas en compte ce qui a été appris et nie l’aléatoire « d’une richesse de rencontres avec la langue » très inégalitaire socialement. Elle ne permet pas non plus de s’appuyer sur un raisonnement déductif et évalue finalement souvent la mémorisation lorsqu’elle a été préparée en amont. De plus, elle ne saurait être simultanément un temps d’apprentissage, contrairement à la croyance que la correction serait un moyen d’apprendre. Certes, cette activité est reprise parfois dans une approche métalinguistique, dans des formats intéressants d’investigations, de questionnements réflexifs et partagés sur la langue.
Mais la chercheuse rappelle que « l’orthographe est inséparable de l’énonciation écrite. Or, la dictée est doublement étrangère à l’énonciation » puisqu’elle est « reçue passivement d’une oralisation extérieure qui se substitue à la prononciation mentale ». Sans compter que si la dictée pouvait être un enjeu de savoir à l’époque des écrivains publics, cette activité n’a aujourd’hui plus de justification sociale.