Sortir de l'enclave

Mis à jour le 25.11.21

3 min de lecture

Reportage à l'école Pagnol de Nice où les élèves problématisent leur cadre de vie

Problématiser son cadre de vie c’est le défi relevé par les CM1/CM2 de l’école Pagnol à Nice (Alpes-Maritimes).

À l’issue de l’heure de géographie, il ne fait aucun doute pour Lyes que « l’Ariane est un quartier périphérique au nord-est de Nice ». Une certitude qui demande encore à être éclairée par les questions construites par la classe en fin de séance. Certaines pour comprendre le présent : « C’est quoi habiter dans un quartier périphérique ? », « L’Ariane est-elle enclavée ? ». Mais Ahmed pointe également qu’ « on interroge le futur » : « Peut-on changer la ville ? », « Comment rénover le quartier de l’Ariane ? ». Serge Battu, formateur et enseignant de cette classe de REP+, considère l’objectif visé pour cette séance inaugurale « ambitieuse » en bonne voie : faire que les élèves passent d’un espace vécu à un espace « analysé », en construisant des « notions compliquées de géographie urbaine : le rapport centre-périphérie, les questions d’enclavement et de mobilité… ». Un passage qui ne va pas de soi car l’enseignant le concède, « la première difficulté est de disposer de documents qui partent du contexte de l’élève ». Impossibles à trouver tels quels dans un manuel, il faut se résoudre à les collecter soi-même.

Vers la prise de conscience citoyenne

C’est donc à l’étude d’un tel recueil documentaire que les élèves se consacrent d’abord. Première étape, qui renforce leurs compétences de lecteur, en identifier les différents types : photographies du quartier, schéma sur la gentrification, carte de Nice, témoignages d’habitants, article de presse... Puis vient le temps de la description et des analyses. Sur une photo, Ahmed reconnaît « l’usine là-bas qui fait de la fumée, où on met les déchets dedans et où on les brûle », ce qui permet de chauffer les immeubles du quartier précise le maître. Sur le cliché d’un défilé d’adultes du quartier, Mariale reconnaît « une manifestation, quand beaucoup de gens viennent pour avoir des choses » : « Ils veulent le tram à l’Ariane parce que le bus c’est trop long pour aller en centre-ville ». La mise en correspondance des documents enrichit la compréhension de problématiques vécues. Elle génère des questionnements sur le droit à l’accès aux transports publics dans toute la ville, l’isolement social autant que physique de l’Ariane, « quartier modeste » en regard d’un centre « très cher ». « Habiter à l’Ariane » est alors pris comme objet d’étude plutôt que comme une évidence vécue. A l’issue de ces lectures collectives, Serge Battu propose de relever les mots importants puis de confronter ces choix en petits groupes : « Périphérie, tu connais pas ? – Si, mais je veux le retenir ». La mise en commun permet de regrouper les mots-clés relevés. Dans l’ensemble « périphérie, enclave, marginaliser, inégalités », Lyes relève que « c’est la même idée, ça veut tous dire « exclus » ». Les questions conçues pour donner un titre à la liasse documentaire « constituent finalement notre travail de géographie en CM1/CM2 », conclut l’enseignant. Et la séquence complète de géographie permettra de « faire de la lecture, du vocabulaire, de la production d’écrits, de la grammaire… sans cloisonner les disciplines, au risque de faire passer la géographie à la trappe par manque de temps ».

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