« Sortir du discours pessimiste »

Mis à jour le 13.05.19

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Chantal Manes-Bonnisseau et Alex Taylor ont rendu un rapport sur l'enseignement des LVE

Quel est votre constat sur les pratiques des langues vivantes ? 

Chantal Manes-Bonnisseau : Il est positif. Depuis les programmes de 2002 qui ont mis en place un enseignement des langues vivantes dans le premier degré et un plan de rénovation des langues vivantes datant de 2006, les élèves français se sentent plus à l’aise à l’oral, sont plus motivés, perçoivent mieux le sens de l’apprentissage d’une langue vivante et comprennent plus aisément la langue enseignée. Il nous faut donc valoriser ces progrès pour sortir du discours pessimiste tenu en France sur nos capacités en langues. Les élèves ont fait des progrès surtout en compréhension. Et c’est très bien ; il faut renforcer ces compétences, tant en compréhension qu’en expression ; l’écrit servant de support à la consolidation des acquis oraux. Alors le niveau pourrait être meilleur si la formation initiale des futurs professeurs des écoles était renforcée en langues étrangères. C’est ce qui fait défaut. Les enseignants sont démunis et ne se sentent pas légitimes car pas assez formés. Les professeurs, les élèves et leurs parents ont un vrai besoin et une réelle envie de développer l’apprentissage des langues vivantes. Il faut s’en saisir.

Qu’est-ce qui fait que cela fonctionne ? 

C.M-B : Aussi bien en France qu’à l’étranger, lorsque l’apprentissage des langues est un projet partagé par tous les acteurs, les élèves atteignent un meilleur niveau de maîtrise. Comme dans ces écoles qui sont allées plus loin que l’horaire obligatoire, avec des activités menées en langue vivante ou encore la mise en place d’un enseignement à parité horaire (l’enseignement d’autres disciplines dans la langue vivante). Ces projets fonctionnent bien quand toute l’équipe est convaincue et investie. Il faut, aussi, de la part de l’institution, du suivi, du soutien et de la valorisation de ce qui est fait dans ces établissements afin que d’autres s’en inspirent. Et puis, apprendre une langue, c’est aussi s’ouvrir à l’autre. Plusieurs expérimentations de partenariats internationaux existent en France, comme dans une école d’Albertville. Cela donne du sens aux apprentissages, les élèves prennent conscience qu’il ne s’agit pas seulement d’une disciplinaire scolaire et cela les motive beaucoup.

Au contraire, que s’agit-il d'éviter à tout prix ? 

C.M-B : Tout d’abord, il s’agit d’éviter le monolinguisme et donc de se focaliser exclusivement et uniquement sur l’anglais. C’est important que tous les enfants apprennent l’anglais durant leur scolarité, mais ils peuvent aussi apprendre une autre langue. Le plurilinguisme fait partie de l’identité française, il serait utile de développer dès le primaire les quatre langues de spécialité du futur baccalauréat. Il faut aussi que les jeunes Français soient moins inhibés, qu’ils arrivent à se convaincre qu’ils ne sont pas plus mauvais que les autres. Pour cela, il faut développer les activités dans la classe, mais aussi hors de l’école.
Du côté de l’enseignant, il est important qu’il s’appuie sur des supports authentiques tels que des enregistrements audio et vidéos. L’oreille des apprenants doit très tôt être entraînée à la sonorité de la langue afin d’éviter d’avoir une mauvaise phonologie dès le départ.

Quelles sont vos préconisations ? 

C.M-B : Les recommandations que nous avons formulées dans le rapport remis au ministre, sont de trois ordres. D’une part, il s’agira de renforcer la place de l’anglais comme langue vivante obligatoire en augmentant le niveau attendu des élèves à l’oral, mais tout en restant dans un contexte plurilingue. Dans un second temps, c’est la formation initiale et continue des enseignants qui doit être repensée. Il faut valoriser les compétences en langues des enseignants en donnant une part plus importante à cet enseignement lors du concours des professeurs des écoles. Pour les enseignants déjà en poste, il faut une formation au plus proche de leurs besoins, avec par exemple des possibilités de formations à l’étranger. Souvent les enseignants ne connaissent pas toutes les ressources qu’elles soient numériques ou même humaines, et les possibilités de travailler dans le cadre d’échanges européens ou internationaux. Pour finir, il faut que les élèves soient plus régulièrement exposés à la langue vivante. Les programmes consacrent 54 heures annuelles à cet enseignement et nous recommandons que ces heures soient réparties quotidiennement, à hauteur de 15 à 20 minutes. 

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