"Soumettre à l’examen critique"
Mis à jour le 11.11.20
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Interview de Séverine Fix-Lemaire, conseillère pédagogique
Séverine Fix-Lemaire, conseillère pédagogique et doctorante en sciences de l’éducation.
C’est quoi la liberté d’expression ?
Elle tient du droit, de la liberté et c’est un bien précieux pour la démocratie. Elle est un droit inscrit dans la loi. Le droit de s’exprimer et de donner son opinion mais dans un cadre défini. Lors d’un débat ou d’un conseil d’enfants, chaque élève peut exprimer une opinion qui sera cadrée par l’enseignant qui joue le rôle du législateur. C’est aussi une liberté proclamée par la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Elle est le fruit d’une évolution historique.
La laïcité, ça s’enseigne ?
Oui et ça s’enseigne. On peut avec les élèves répondre à des questions concrètes : que recouvre la liberté d’expression en France ? Comment en est-t-on arrivé là ? Quelles sont les valeurs qui facilitent ou pas le vivre-ensemble ? Enseigner la liberté d’expression, c’est défendre la possibilité qu’on peut soumettre à l’examen critique, avec les outils de l’école, toute opinion et toute vision explicative du monde. Il faut aussi clarifier ce qu’est une valeur, une norme, un principe. La norme est une règle, une loi à laquelle on doit se conformer. Le principe est une prescription fondamentale sur laquelle repose l’organisation de notre pays, la laïcité est un principe en France. C’est une clarification indispensable.
La laïcité, ça s’apprend ?
Le préambule de la Constitution de 1958 et la charte de laïcité permettent de comprendre la laïcité et de se rendre compte qu’elle n’est pas une valeur mais un principe républicain. On pourra étudier quelques dates clés comme 1882, où les écoles publiques deviennent laïques, 1905, loi de séparation des Églises et de l’État et la loi de 2004 qui précise notamment que les enseignants ne doivent pas faire état de leurs convictions politiques ou religieuses.
Et les faits religieux ?
Travailler sur les faits religieux permet de définir la laïcité avec les élèves et les amène à comprendre l’importance de ce principe. Je conseille de passer par les jeux comme « l’arbre à défi » où des activités permettent de travailler sur les stéréotypes, les religions, mais aussi l’athéisme, l’agnosticisme, sur la chronologie de l’apparition des religions, sur les fêtes religieuses... Ces jeux permettent d’aborder les faits religieux de manière simple et dépassionnée. Les élèves apprennent les uns avec les autres, les uns des autres. Ils apprennent qu’à l’école tout sujet peut devenir objet de savoir
Et si des enfants sont dans le refus ?
Certains élèves peuvent être passifs ou opposants et mettre à mal le dispositif et l’enseignant. Je conseille de passer par le jeu pour ensuite aller vers le débat. Il serait intéressant de faire une séance d’apprentissage en début d’année sur ce que c’est un débat, pour définir avec les élèves ce qu’est un argument, un contre-argument, un avis. Ce serait l’occasion d’élaborer les règles du débat, de travailler l’écoute, de comprendre qu’on a le droit de changer d’avis, de faire la différence entre convaincre, qui s’appuie sur des arguments rationnels, et persuader, qui joue plutôt sur l’émotionnel et le personnel. Une occasion pour tous de comprendre l’importance du débat dans la classe et pour la démocratie.
