Loi Blanquer, ça change quoi ? Ép.5 Une formation initiale étriquée
Mis à jour le 04.03.19
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Les ESPÉ deviennent les INSPÉ. Derrière un changement de nom ce sont surtout les questions de contenus, de recrutement et d’organisation de la formation qui se trouvent ouvertes par le projet de loi de "l'école de la confiance".
Écoles normales, Iufm, Espé, Inspé …
Le projet de loi supprime les Espé et les remplace par les Inspé (Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation) dont les directeurs seront nommés directement par le ministre et qui ne dépendront donc plus du système de nomination au sein de l’Université. L’éducation nationale reprend donc la main pleine et entière sur la formation initiale.
L’article 12 de la loi modifie en effet la gouvernance des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation afin d’élargir le recrutement des directeurs d’INSPÉ et affiche l’ambition de le rendre plus transparent, mais à la main du ministre. Les nominations des directeurs et directrices des futurs INSPÉ ne se feront plus sur proposition des conseils d’école comme c’était le cas pour les ESPE mais seront faites par le ministre sur proposition d’un comité d’audition co-présidé par le recteur et le président de l’université de rattachement.
Pour quel référentiel de formation ?
Le référentiel de formation des futurs enseignantes et enseignants n’est pas encore connu à ce jour mais le ministère a obtenu un blanc-seing des députés pour le réaliser et c’est lui qui définira le contenu de la formation des professeures et professeurs en devenir. Le projet actuel a déjà tracé des volumes de temps d’enseignement qui consacreraient une très large part (55%) à l’enseignement des savoirs fondamentaux et des valeurs de la République. 20% seraient dédiés à la pédagogie, la psychologie et la gestion de classe, 15% à la recherche et 10% seraient laissés à l’initiative des Inspé. Dans ce projet aucune référence n’est faite aux disciplines autres que celles jugées fondamentales ce qui n’est pas sans rappeler la vision étriquée des contenus scolaires portée aujourd’hui par le ministre.
Dans le même temps, l’article 12 bis prévoit que les INSPÉ proposent des formations d’approfondissement – et non plus seulement de sensibilisation – à certains enjeux de société comme l’égalité entre les femmes et les hommes, les discriminations, la scolarisation des élèves en situation de handicap, ou encore la prévention et la résolution non violente des conflits. De vrais sujets d’importance mais dont on ne perçoit pas pour l’instant, dans le projet, la mise en œuvre concrète.
Une pré-professionnalisation pour les AED
L’article 14 modifie les missions des assistants d’éducation pour permettre à ceux qui se destinent aux concours de l’enseignement et de l’éducation de « se voir confier progressivement des fonctions pédagogiques, d’enseignement ou d’éducation » dans le but de développer la pré-professionnalisation des enseignants et des personnels d’éducation. Ils pourront donc dès la L2 assurer des missions de remplacement et devenir ainsi de véritables moyens d’enseignements contractualisés. Une façon non déguisée et à coût réduit de pallier les difficultés de recrutement et de remplacement.
Les articles concernant la formation initiale dans cette loi ne représentent que la partie émergée d'une vaste réforme de la formation initiale qui s'annonce. Seuls les aspects qui avaient besoin d'une traduction législative y sont traités. La question de la place du concours ou des véritables contenus de formation seront vus ultérieurement. Mais on le voit bien, rien dans cette loi pour une "école de la confiance" ne vient aborder les véritables enjeux de l’époque concernant la formation initiale des professeurs dont l’école a besoin. Au contraire c'est une vision réductrice des enjeux d'apprentissage et des méthodes pour y parvenir qui se profile.