Appréhender la Shoah
Mis à jour le 05.03.22
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Reportage dans le Nord où les élèves enquêtent pour appréhender la Shoah
Comment dépasser l’émotion pour construire des connaissances scientifiques ? En s’appuyant sur des documents factuels selon Géraldine Grouwet, PE à l’école Macé de Halluin (Nord).
À l’école Jean Macé de Halluin (Nord), Géraldine Grouwet fait le pari d’une démarche scientifique pour permettre à ses élèves d’appréhender la réalité complexe de la Shoah. Confrontés à des documents, qu’ils soient iconographiques ou écrits, ils et elles apprennent à les questionner et à les analyser. « L’enjeu d’un travail sur la Shoah - comme sur l’esclavage d’ailleurs - explique Géraldine Grouwet, est de transmettre des valeurs, de susciter l’interrogation et de développer l’esprit critique des élèves. C’est donc un travail qui croise l’enseignement de l’histoire et de l’EMC ». Depuis plusieurs années, l’enseignante de la classe de CM2 démarre son projet le 27 janvier, journée internationale de commémoration en mémoire des victimes de la Shoah et date anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau. Plusieurs séances, lors desquelles les élèves sont installés en ateliers pour enquêter sur cette période terrible de l’Histoire. Certains groupes travaillent autour du vocabulaire lié à la Shoah, d’autres décrivent le quotidien des Juifs de Varsovie en se basant pour les uns, sur des documents photos, pour les autres sur des témoignages écrits ou vidéo, et un dernier groupe travaille sur les Justes, ces résistants et résistantes qui n’ont pas hésité à « risquer leur vie pour aider les autres en envoyant, par exemple, à manger à travers les murs du ghetto de Varsovie » comme l’explique Adil lors de la mise en commun.
Carte mentale
Tous les élèves sont invités à questionner les documents qu’ils ont à leur disposition, à en décrire les éléments et à en discuter au sein de leur groupe pour ensuite rédiger ensemble une trace écrite sous forme de carte mentale à restituer devant le reste de la classe. « Les enfants ciblent les mots clés à partir desquels ils font des liens. Cette démarche leur permet de structurer leurs connaissances, de classer et synthétiser les informations qu’ils reçoivent ». Dans le groupe ayant travaillé sur le vocabulaire, les termes tels qu’extermination, ghetto, humiliation… sont décryptés et contextualisés. « Cela permet une mise à distance émotionnelle et une analyse factuelle », commente l’enseignante. « La Shoah, ça veut dire catastrophe en hébreu, explique Valentine, parce six millions de juifs ont été exterminés seulement car ils étaient juifs ». Les groupes passent les uns après les autres, présentant des cartes mentales qui décrivent le quotidien des Juifs enfermés dans des ghettos, des enfants humiliés par le port de l’étoile jaune, ou encore celui des Justes. Tous s’insurgent contre cette ignominie dont ont été victimes Juifs et Juives. « Je ne comprends pas pourquoi les nazis ont fait ça, on est tous égaux », s’exclamera l’une d’entre eux. C’est là l’enjeu premier d’un tel enseignement comme l’explique Martine Drod-zinski, CPC à l’origine du projet dans plusieurs écoles de sa circonscription : « l’enseignement de la Shoah a une finalité civique, il répond à une obligation morale. Il ne s’agit pas uniquement de transmettre des connaissances mais aussi de donner à tous les élèves des éléments de culture et de réflexion permettant de refuser toutes les formes de racismes et de discriminations ».
* Les prénoms ont été modifiés