Sur l'enseignement de la géographie

Mis à jour le 25.11.21

2 min de lecture

Interview de Sylvie Joublot Ferré, docteure en géographie

SYLVIE JOUBLOT FERRÉ est docteure en géographie, professeure agrégée et diplômée de sciences politiques.

Dossier 478 Géo Sylvie Joublot Ferré

En quoi les sorties scolaires sur le terrain participent à la construction de savoirs géographiques ?

Il y a une dimension pratique avec l’exploration d’un terrain qui, certes, est familier mais qui est en fait relu, redéchiffré à la lumière des questions posées mais aussi des échanges entre pairs. Cela permet la verbalisation, l’observation, la description qui sont des opérations cognitives fondamentales en particulier avec les tout petits. Il y a la construction de repères géographiques véritablement spatiaux dont on va nommer des balises, associer des traces, des noms, des orientations, etc. Il y a également la construction de savoirs citoyens puisqu’on va déchiffrer ensemble un espace public partagé avec les autres. Une procédure de socialisation et d’attachement va se produire car plus un espace devient familier, plus on a la capacité d’éprouver quelque chose pour celui-ci. Les enfants vont être plus attentifs, avoir une lecture plus documentée du point de vue sociétal, voire politique. De fait, cela va nourrir une capacité à se positionner politiquement vis-à-vis des grands défis sociétaux et permettre la construction d’un rapport au monde éclairé et documenté. 

Qu'est-ce qu'une démarche d'enquête ? 

À partir de questionnements, les élèves vont enquêter sur le terrain. Avec cette démarche, il s’agit pour l’enfant d’aller au-delà de la simple réception d’un savoir qui vient de l’adulte et d’être mis en situation de construction des savoirs et compétences. Les élèves construisent un savoir pour eux-mêmes et participent à une communauté de savoirs. La confrontation aux autres permet de renforcer les compétences sociales et de navigation. Mais l’enquête sur le terrain à elle seule ne suffit pas, elle doit s’accompagner d’un retour réflexif avec, par exemple, une mise en récit. Il ne s’agit pas nécessairement de rendre compte de toute l’enquête mais de faire des zooms sur certains aspects et de laisser les enfants être créatifs. 

A quelles difficultés sont confrontés les PE ? 

Les PE peuvent avoir des représentations de la géographie figées comme étant une discipline fastidieuse où il s’agirait de cumuler des savoirs nomenclaturaux. La géographie de terrain nécessite une préparation importante et les enseignants n’ont pas toujours le temps de préparer un tel dispositif. Enfin, la notion « habiter » peut paraître déstabilisante parce que finalement, c’est une géographie de la proximité, des spatialités des individus et les PE ne sont pas forcément formés à cela. Le levier principal pour surmonter ces difficultés est la formation initiale et continue des enseignants. C’est aussi aller explorer le territoire immédiat de l’école, se mettre en situation de géographe de terrain. Ce faisant, les PE seront probablement en capacité ou en curiosité de le faire avec leurs élèves. Essayer, s’autoriser, ne pas se laisser décourager et croire à la dimension cognitive de l’enquête de terrain qui est considérable.

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