Une maison commune
Mis à jour le 09.09.21
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Reportage dans le Morbihan chez les gagnants du concours "Comment j'ai inventé ma maison"
C’est à Saint-Jacut-Les-Pins (Morbihan) que se niche l’ITEP* dont les élèves ont gagné le concours « Comment j’ai inventé ma maison » organisé par le SNUipp-FSU.
En pleine campagne morbihannaise (56), la trentaine d’élèves de l’ITEP ont cet après-midi-là les honneurs de l’association « La Bousselaie-Fandguelin » qui gère leur structure. Les gagnants et gagnantes du concours (voir ci-contre) reçoivent un diplôme et une médaille qui couronnent la réalisation, individuelle mais surtout collective, d’une maison « imaginée » aux façades multiples.
« C’est moi qui ai fabriqué le coffre-fort en poterie », chuchote Jordan, « là j’ai mis un grand garage parce que j’aime les grosses voitures ». « Dans cette maison, il y a à la fois leur vécu, un clin d’œil à ce qu’ils ont fait avant et leurs activités », commente Yves Lhermitte, un des éducateurs du groupe « ESSOR » des 12-14 ans, « chef d’orchestre » du projet qui a assemblé la maquette.
Créer du collectif
« Nous travaillons beaucoup en projet, commence Benoît Leclerc, l’un des enseignants du dispositif, en charge de la douzaine de 10-12 ans du groupe « ENVOL ». « Cela permet une grande transversalité des apprentissages. » « Depuis plusieurs années, les trois groupes de l’ITEP, petits, moyens et grands, participent au concours, poursuit-il. Comme il n’est pas réservé au milieu adapté, il n’est pas ressenti comme stigmatisant. Et travailler à un produit fi ni est motivant pour nos élèves ». « Ils ont une grande fierté d’avoir gagné et d’avoir contribué à un travail collectif où chacun apporte sa petite pierre à l'édifice», explique Yves. Au-delà de leurs difficultés cognitives, ce sont les interactions sociales et le manque de confiance en eux qui empêchent ces enfants « de mobiliser leurs ressources »selon Benoît.
Une maison comment ?
Le thème du concours a de quoi en interroger plus d’un, en plein confinement, mais particulièrement ces enfants « qui ont souvent 2, 3 parfois 5 maisons : famille d’accueil, internat de l’ITEP, famille d’accueil de l’établissement, leur propre famille... », précise Anthony Panhaleux qui dirige la structure. Comment donc imaginer ce lieu ressource où il fait bon vivre quand « 50% des enfants ont des mesures ou des placements par l’ASE », continue-t-il. « Nous avons commencé en plein confinement, et parfois à distance, sur une base d’appartement imaginaire proposé par Pénélope Bagieu, dessinatrice de BD », raconte Yves. Il a fallu ensuite échanger en petits groupes, resserrer les contraintes, réduire pour que la maquette soit « réalisable ». Partir de leurs envies mais cadrer les choses. Chaque jeune fait des propositions et chaque éducatrice a pu relier son « support ». Anita, Carine, Maëlle… L’atelier poterie d’Anaïs a été mis largement à contribution sur les constructions de meubles. À côté de l’urbanisme ou de l’écologie, la dimension esthétique a été un élément important. « À l’ITEP, nous travaillons beaucoup sur les émotions, les nommer, en parler, développe l’éducateur. Pour le projet, nous avons eu une approche sensible de l’environnement pour arriver à une connaissance émotionnelle de leur milieu ».
Un étayage pour les apprentissages
L’interdisciplinarité d’un tel projet permet à Emmanuelle Rampal, l’enseignante des grands et à Benoît, de rendu plus qualitatif, le collectif est plus fort que l’individualité ». conclut Yves. « J’ai été surpris parce qu’il y a eu de bonnes idées comme les panneaux solaires », reconnaît Jordan qui rêve de vivre au milieu des animaux. « En travaillant avec les autres, on est obligé de négocier », philosophe Emma du groupe des grands. Pour Meredith, l’une des élèves de Benoît, dont la maison sera toute de technologie, « faire en vrai c’est mieux que dans les livres ». Pour ces élèves pour qui passer le pas de la porte de la classe est parfois la première difficulté, avec de tels projets, la découverte est aussi venue des autres.
*ITEP : Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique.
ANNE MATTHAEY est conseillère pédagogique départementale (67), chargée de la mission architecture.
Elle a rédigé un dossier très complet sur l'enseignement architecture à l'école.
L'espace...quels apprentissages ?
L’espace, on y vit et souvent on le subit. Interroger ses ressentis, ses sensations, les émotions qu’un espace génère, comprendre pourquoi dans un lieu on se sent bien ou pas, c’est capital. On apprend à regarder les dimensions, le rapport à la lumière, les matériaux. On peut agir sur l’espace, le transformer et aussi explorer les impacts écologiques de la construction et du fonctionnement des espaces dans lesquels on vit. Comprendre que tout est interdépendant et que nos choix ont des conséquences, c’est un apprentissage fondamental.
Quel intérêt de recourir à l'imagination ?
L’imagination, ce n’est pas inné. Cela implique d’avoir des images en mémoire, donc d’en avoir été nourri. C’est un des enjeux de l’éducation artistique et culturelle. Les images qu’on a dans la tête, c’est comme les mots qu’on a dans son vocabulaire. Ça permet de penser plus large et par recombinaison, association d’idées, pensée divergente, d’inventer, de créer, de s’exercer au rôle de concepteur et non plus d’exécutant dans lequel de nombreuses tâches scolaires enferment les élèves.
D'autres pistes pour travailler la créativité ?
Permettre aux élèves de rencontrer des œuvres nombreuses autour de la problématique qu’ils explorent, en les initiant au langage plastique pour qu’ils puissent choisir sur quelles composantes jouer, la composition, la lumière, la matière, et en les incitant à réfléchir à leur intention de créateur : que veulent-ils exprimer et quelles émotions veulent-ils faire passer à ceux qui vont regarder leur production?
NOUVEAU CONCOURS
Paillettes, lumières, roulements de tambours : nous voilà au cirque ! Cette année, le concours du SNUipp-FSU propose donc à chacun•e d’en revisiter les codes.
DES PISTES
On pourra explorer le lieu et l’espace du cirque, s’émerveiller du spectacle, traditionnel ou plus poétique. Rencontrer des artistes, du magicien à la trapéziste. Découvrir le vocabulaire circassien. S’interroger aussi sur sa place dans la société...
DES INGRÉDIENTS
Toutes les formes sont possibles : livre, BD, jeu, récit, image, fi lm, création en volume. Les réalisations devront intégrer trois éléments : l’imagerie, la dimension humaine et le vocabulaire du cirque. On attend aussi un récit, romancé ou documentaire, autour de ce qui a mené à cette réalisation.
DES RESSOURCES
Des peintures, des livres, des films, des documentaires, des sites pour découvrir que le cirque a inspiré de nombreux artistes.
DES RÈGLES
Chaque classe inscrite au concours adressera son œuvre au SNUipp-FSU avec une fiche résumant la démarche pédagogique. Quel cirque !