Violences faites aux femmes
Mis à jour le 07.03.22
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Interview de Pauline Delage, sociologue
PAULINE DELAGE
Sociologue, chercheuse au CRESPPA-CSU
Quels rôles jouent les stéréotypes de genre dans les violences sexuelles et sexistes ?
Ces violences s’appuient sur des normes de genre, représentations et attentes différentes pour les filles et les garçons. Par exemple, les insultes perpétrées par des hommes dans l’espace public portent sur la sexualité des femmes : elles contribuent à la stigmatiser et à entériner l’idée selon laquelle les hommes sont autorisés à la contrôler. Dans la société mais aussi dans les relations amoureuses, conjugales ou familiales, les remarques humiliantes sur leur apparence (maquillage, habillement…) jouent le même rôle : apprendre aux femmes à rester à leur place. Dans le même temps, les représentations erronées des violences sexuelles chez les femmes adultes alimentent le contrôle et la peur. Alors qu’elles sont essentiellement commises par des hommes connus, on entretient le mythe du viol isolé, dans la rue, par un inconnu, voire racisé et issu des quartiers populaires.
Quelle éducation pour des rapports plus égalitaires ?
Il y a toute une palette possible de formations. Certaines portent sur les questions d’égalité, d’autres se centrent sur les risques encourus pendant les rapports sexuels (IST, grossesse) mais n’abordent pas toujours le consentement ou la sexualité en dehors du cadre hétérosexuel. La différence entre ce qui est de l’ordre du conflit et de la violence dans les relations amoureuses demeurent alors souvent un impensé. Si on ne parle pas du sexisme et des rapports de genre dans l’éducation, on entretient une confusion entre le conflit, dispute symétrique posée sur un rapport égalitaire offrant une issue possible et un contrôle de l’autre entretenant une domination.
Quelles politiques publiques possibles ?
Il en existe plusieurs types dont la formation et la sensibilisation, l’accompagnement des victimes et la sanction des agresseurs. À mon avis, il s’agit aujourd’hui de renforcer l’existant. Les lois et des dispositifs actuels ne sont pas toujours mis en œuvre par manque de moyens, de formation et de temps. La lutte contre les violences ne peut se faire sans des services publics solides pour la mettre en œuvre, sans financements pérennes pour les associations, sans prendre à bras le corps la précarité et les inégalités plus générales qui touchent les femmes et les empêchent de sortir d’un contexte de violence ou de s’émanciper.